Les hommes virils lisent de la romance, Lyssa Kay Adams

Couverture Les hommes virils lisent de la romance

La première règle du club de lecture :
On ne parle pas de club de lecture.

Le mariage de Gavin Scott est un problème. La star du baseball des Nashville Legends a récemment découvert un secret humiliant : sa femme Thea a toujours fait semblant d’être le Big O. Sa réaction à cette révélation est la goutte d’eau qui fait déborder le vase dans leur relation déjà tendue. Thea demande le divorce, et Gavin se rend compte qu’il a laissé sa fierté et sa peur prendre le dessus.

Bienvenue au Club de lecture Bromance.

Désemparé et désespéré, Gavin trouve de l’aide auprès d’une source improbable : un club de lecture romantique secret composé des meilleurs hommes alpha de Nashville. Avec l’aide de leur lecture actuelle, une régence torride appelée Courting the Countess, les gars entraînent Gavin à sauver son mariage. Mais il faudra bien plus que des mots fleuris et des gestes grandioses pour que ce malheureux Roméo retrouve son héros intérieur et regagne la confiance de sa femme bien-aimée.

Editions Harlequin (3 mars 2021) – 416 pages
Papier (16,90€) – Ebook (5,99€)

AVIS

Si l’expérience globale de lecture fut agréable, j’ai regretté que l’autrice, en voulant dénoncer certains problèmes du patriarcat, tombe parfois dans le piège des stéréotypes. Pour ma part, je ne pense pas que toutes les femmes lisent de la romance et non, je ne trouve rien de très sexy à un clin d’œil. Au mieux, j’aurais tendance à penser que l’homme devant moi veut se débarrasser maladroitement d’une poussière dans l’oeil ; au  pire, que c’est une tentative de séduction soit maladroite, soit condescendante, voire les deux. Je forcis le trait, mais vous m’aurez compris : toutes les femmes sont différentes, et vouloir prétendre le contraire, c’est tout sauf un message féministe… Lire la suite

Tu fais quoi pour Noël ? Je t’évite ! de Juliette Bonte

Charlie déteste Blade, et Blade le lui rend bien. Elle a essayé de s’entendre avec ce grand brun – vraiment ! – mais entre eux, ça ne passe pas. Le problème, c’est que Blade est un ami de James, le nouveau petit copain de la meilleure amie de Charlie. Lire la suite

12 bis, avenue du Maréchal-Joffre, Anne de Kinkelin

12 bis, avenue du Maréchal Joffre : Un roman d'apprentissage qui fait l'éloge de l'audace et du voyage (HarperCollins) par [Anne de Kinkelin]

«  Qu’avais-je, moi, pour commencer  ? Une adresse  : 12 bis, avenue du Maréchal-Joffre 78800 Houilles. Je n’aimais rien dans cette localisation.  »

12 bis, avenue du Maréchal-Joffre, à Houilles. C’est son adresse. Banale, comme elle. Hôpital-maison-bac avec mention  : un pur esprit dans un corps frêle et l’âme perdue dans un sfumato proche de la brume du lac de Côme. Mais voilà qu’un jour, réfugiée sur son toit, Léa acte la rupture. L’été est là. L’heure des possibles. Le moment rêvé pour quitter les siens et surtout, vérifier si la banalité du lieu où l’on vit détermine la grandeur de son destin.
Elle tient l’itinéraire parfait  : parmi les milliers d’occurrences trouvées sur Google, quatre «  12 bis  », des êtres dont elle ignore tout et veut tout savoir. 2615 kilomètres plein Sud, de Mérignac à La Colle-sur-Loup en passant par Tarbes et Biarritz, pour goûter à l’art des jardins sauvages, vivre sa vie à l’envers, rire de la colère et –  qui sait  ?  – apprendre à aimer sa mère

HarperCollins (3 juin 2020) – Broché (18€) – Ebook (11,99€)

AVIS

Anorexique depuis de nombreuses années, Léa souffre, mais un jour, elle a un déclic : l’heure de l’émancipation et du changement a sonné ! Et cela passe par un voyage, autant physique qu’introspectif, qui va la conduire aux quatre coins de la France chez quatre inconnus habitant, tout comme elle, au 12 bis, avenue du Maréchal-Joffre. En toile de fond de ce saut dans l’inconnu, une question : en habitant une adresse aussi banale, est-il possible d’avoir un destin ?

L’idée de départ a quelque chose de complètement fou, mais aussi de tellement innocent, poétique et romanesque… Pour apprécier ce roman, il faut d’ailleurs accepter le caractère insolite de la démarche, et faire fi de ces parcelles de rationalité nous poussant à considérer les risques : et si Léa faisait de mauvaises rencontres, et si elle se faisait agresser, et si elle tombait malade, et si elle manquait d’argent… Et, peut-être tout aussi dur pour sa mère qui a centré toute sa vie sur son enfant malade, et si Léa entrevoyait enfin la lumière au bout du tunnel ?

En découvrant la vie de Léa, son besoin d’évasion et de fuite pour se (re)trouver nous apparaît assez logique et semble même vital. Comment peut-elle guérir quand sa vie se résume à une prison médicalisée et à un appartement dans lequel elle est constamment surveillée ? Entre une mère aigrie qui ne s’exprime plus qu’avec acrimonie et considère d’un œil hargneux les velléités d’indépendance de sa fille, et un père qui a fait d’elle son doudou, quelle place peut-elle réellement revendiquer si ce n’est celle qu’on a consenti à lui assigner à son corps défendant ?

Au cours de son voyage et au gré des rencontres, Léa va apprendre beaucoup sur elle-même. Elle va se réapproprier progressivement son existence, ses envies, ses rêves, et faire la paix avec ce corps contre lequel elle a si longtemps lutté. Plus une petite fille, mais pas encore une femme, elle avance avec détermination tout en gardant au fond d’elle cette fragilité qui donne envie de la prendre dans les bras et de la rassurer. Certes, ses débuts dans la vie ont été difficiles, mais ils ne conditionnent en rien son avenir qu’elle commence, petit à petit, à modeler à son image, et non en fonction des attentes de ses parents.

Plus les pages défilent, plus l’on sent à quel point la fille perdue des débuts s’affirme et revendique enfin sa place dans ce monde. Curieuse, intelligente et d’une rafraîchissante et déroutante honnêteté, Léa m’a émue et touchée. Son évolution m’a, en outre, beaucoup plu tout comme ses rapports avec sa mère qui connaissent de profonds et surprenants bouleversements. Le roman possède donc une belle dimension feel good que je n’avais pas anticipée, mais qui rend la lecture particulièrement agréable et fluide tout comme la narration alternée bien amenée et exploitée.

Celle-ci nous permet de suivre les pensées de Léa et d’en apprendre plus sur ses parents et les personnes qu’elle rencontre tout au long de son road trip. Si j’ai trouvé intéressant de découvrir la galerie variée de personnages, certaines personnalités m’ont plus touchée que d’autres à l’instar de Joseph, un homme doux qui a trouvé son salut dans le jardinage. J’ai également apprécié Garance, une écrivaine publique, qui va se révéler d’une grande aide pour Léa qu’elle va prendre sous son aile avec beaucoup de bienveillance et de douceur. Milo, mannequin solitaire qui se cache derrière sa beauté, est la personne qui m’a le moins inspirée, mais j’ai apprécié son évolution et la manière dont l’intrusion de Léa dans sa vie va lui offrir matière à réflexion.

Marceau, animateur de radio nocturne à fleur de peau, est, quant à lui, un personnage qui émeut même si je pense qu’un point le concernant pourra heurter certains lecteurs. Pour ma part, mes réserves du début se sont envolées devant le naturel avec lequel les choses se déroulent… Très différents les uns des autres, ces personnages seront une étape indispensable dans le voyage de Léa qui, en échange de leur hospitalité et/ou de leur attention, sèmera en eux les graines du changement.

L’autrice, à travers cette histoire aux allures de quête initiatique et de roman d’apprentissage, évoque le besoin de liberté et d’émancipation, la quête de soi, la fin de l’adolescence et le début parfois difficile de la vie d’adulte, la pression sociétale sur les femmes et leur rôle de mère, mais elle parle aussi beaucoup d’amour. Aimer, ne pas s’aimer, mal aimer, aimer malgré tout, aimer sous pression, apprendre à aimer et à pardonner, se libérer d’un amour toxique, se séparer, se retrouver… Des thèmes forts abordés avec justesse, élégance et subtilité ! 

Anne de Kinkelin nous parle également des relations mères-filles oscillant parfois entre haine et amour inconditionnel, et d’un autre sujet que je vous laisserai découvrir puisqu’il apporte un changement majeur dans la vision que l’on peut avoir de l’histoire. Vous découvrirez ainsi que les apparences sont parfois trompeuses et qu’il faut faire attention avant de porter des jugements trop hâtifs sur certaines personnes sous peine de se montrer profondément injuste et de transformer des victimes en bourreaux… Pour ma part, j’ai été profondément révoltée par la monstruosité d’une personne qui, des années durant, a endossé un rôle pour mieux tromper et manipuler son entourage. Je sais que de tels individus existent et je n’ose imaginer les dégâts qu’ils laissent derrière eux.

Quant à la plume de l’autrice, immersive, fluide et poétique, c’est un enchantement de tous les instants d’autant qu’Anne de Kinkelin possède l’art de la formule avec des phrases percutantes qui vous restent en tête et qui résonnent au plus profond de votre être… Petit bonus, chaque titre de chapitre est un intitulé d’un morceau de musique, ce qui permettra aux lecteurs qui le souhaitent d’accompagner leur lecture en musique et/ou de se constituer une petite liste d’œuvres à (re)découvrir.

En conclusion, 12 bis, avenue du Maréchal-Joffre est un magnifique et poignant roman, empreint de poésie et de bienveillance, sur la résilience, l’acceptation de soi, les secondes chances, la famille, et sur l’amour, l’amour qui blesse, mais aussi celui qui fait grandir et libère… Touchante dans sa vulnérabilité, Léa nous montre que pour vivre, il faut déjà apprendre à s’aimer et à trouver dans les petites choses de la vie et les opportunités qu’elle offre, ou que l’on provoque, les graines de son futur bonheur. Il suffit pour cela d’un projet un peu fou, de beaucoup d’audace, et d’une bonne dose d’espoir… Belle, poétique et inspirante, cette histoire devrait vous émouvoir et vous offrir un beau moment d’évasion à savourer sans modération !

Je remercie les éditions HarperCollins pour cette lecture.

Les cicatrices, Claire Favan

Les cicatrices : le nouveau thriller de la plus machiavélique des autrices du genre (HarperCollins) par [Favan, Claire]

Centralia, État de Washington. La vie d’Owen Maker est une pénitence. Pour s’acheter la paix, il a renoncé à toute tentative de rébellion.
En attendant le moment où il pourra se réinventer, cet homme pour ainsi dire ordinaire partage avec son ancienne compagne  une maison divisée en deux. Il est l’ex patient, le gendre idéal, le vendeur préféré de son beau-père qui lui a créé un poste sur mesure. Un type docile. Enfin, presque. Car, si Owen a renoncé à toute vie sociale, il résiste sur un point : ni  le chantage au suicide  de Sally ni  les scènes qu’elle lui inflige quotidiennement  et qui le désignent comme bourreau aux yeux des autres ne le feront revenir sur sa décision de se séparer d’elle.
Mais, alors qu’une éclaircie venait d’illuminer son existence, Owen est vite ramené à sa juste place. Son ADN a été prélevé sur la scène de crime d’un tueur qui sévit en toute impunité  dans la région, et ce depuis des années. La police et le FBI sont sur son dos. L’enfer qu’était son quotidien n’est rien  à côté de la tempête qu’il s’apprête à affronter.

HarperCollins (4 mars 2020) – 368 pages – Broché (20€) – Ebook (12,99€)

AVIS

Afin d’étayer mon avis, j’ai évoqué certains points qui, sans être des spoilers, peuvent vous mettre sur la piste de certaines révélations. Je vous invite donc à lire ma chronique plus tard si vous souhaitez lire ce roman avec un maximum d’effet de surprise.

Retrouvé à moitié mort, il y a de nombreuses années, Owen, incapable de se souvenir de son passé, s’est bâti une nouvelle vie, celle un homme serpillère qui endure stoïquement les frasques d’une ex-femme complètement dérangée qui refuse de reconnaître leur séparation. Crises de jalousie et de démence, pression psychologique, violences physiques, menaces et tentatives de suicide rythment ainsi son quotidien.

L’autrice nous brosse ici le portrait d’un homme dévasté dont l’attitude de victime peut exaspérer et donner envie de le secouer pour qu’il réagisse et mette fin à toute cette folie. Mais si Owen m’a parfois agacée par sa passivité, j’ai également compris ses difficultés à se sortir de la situation intenable dans laquelle son ex-femme et sa belle-famille l’ont enfermé. Son envie de reprendre les rênes de sa vie se confronte ainsi à la peur viscérale d’avoir le suicide de son ex-femme sur la conscience…

Sa vie va néanmoins prendre une tournure encore plus dramatique quand son ADN va être trouvé sur la scène de crime d’un tueur en série qui n’avait plus fait parler de lui depuis des années. Sous le joug d’une ex-femme hystérique, en proie à des cauchemars de plus en plus violents et réalistes, et suspecté par un agent du FBI retors et enfermé dans le carcan de ses certitudes et de ses espoirs, Owen perd pied ! Il pourra heureusement compter sur le soutien de la petite étincelle de bonheur qui a récemment fait irruption dans sa vie, Jenna, une policière qui croit en lui et en son innocence…

Intense, c’est le premier mot qui me vient à l’esprit pour qualifier ce thriller qui joue à merveille sur les faux-semblants, les apparences et les mensonges. L’autrice pousse les lecteurs dans leurs retranchements jouant avec leur empathie et leurs émotions pour mieux les tromper et les détourner de la vérité. Avec elle, les victimes deviennent bourreaux et les bourreaux finissent par être victimes de leur propre ignominie. La vengeance est donc au cœur de cette histoire et prend des proportions inimaginables, du moins, pour un esprit sain.

La survie du corps signifie-t-elle automatiquement celle de l’esprit ou y a-t-il un seuil d’horreur et de douleur à partir duquel l’âme humaine se perd pour emprunter des chemins tortueux ? Une question, parmi tant d’autres, qui vous viendra à l’esprit à mesure que des scènes d’une grande violence prennent vie sous vos yeux. Alors que l’autrice n’entre pas forcément dans les détails, elle arrive à nous faire ressentir toute la souffrance et le désespoir des victimes d’un être abject qui n’hésite pas à kidnapper, à torturer et à violer pour assouvir ses plus bas instincts. Si certaines femmes vacillent rapidement, d’autres survivent des années et offrent cette résistance qui excite et stimule tellement leur bourreau.

Suivre la captivité de ces femmes réduites à l’état d’objet sexuel se révèle difficile, mais je n’ai jamais eu le sentiment que l’autrice tombait dans la surenchère. D’ailleurs, bien que je sois sensible, j’ai trouvé le livre supportable à l’exception, peut-être, d’une scène de torture qui m’a fait quelque peu vaciller par son réalisme. Mais je l’ai trouvée bien amenée pour faire ressentir aux lecteurs le degré de haine atteint par un personnage. À cet instant, on a la certitude que son esprit est brisé et qu’il a atteint un point de non-retour. Est également soulevée la question de l’éducation et de l’impact qu’un être pervers et malsain peut avoir sur un esprit en construction…

Le roman, alternance de points de vue et de chapitres courts, se lit très rapidement d’autant que l’autrice arrive à ménager son suspense jusqu’à la fin et à doser sa tension de manière à la rendre constante. À chaque fois que l’on pense avoir touché du doigt le dénouement final, elle relance l’intérêt du lecteur en apportant un nouvel éclairage sur l’intrigue, l’enquête ou les personnages. Bien que j’aie anticipé certains rebondissements, j’ai apprécié d’être transportée dans une histoire complexe dont il est bien difficile de dénouer tous les fils avant d’avoir tourné la dernière page.

En plus d’une intrigue efficace qui ne souffre d’aucun temps mort, Claire Favan offre une galerie de personnages variée que l’on sent, pour la plupart, au bord du gouffre : certains en raison de leurs illusions les enfermant dans un enfer personnel et/ou professionnel, d’autres parce qu’ils sont véritablement en enfer ou, à l’inverse, parce qu’ils n’ont jamais su profiter de leur liberté retrouvée. Nul besoin de murs pour être emprisonné…

En conclusion, Les cicatrices est un thriller particulièrement efficace qui vous plongera sans douceur et avec un réalisme déconcertant dans les plus sombres recoins de l’âme humaine et de sa perversité. Souffrance, mensonges, faux-semblants et personnages sur le fil du rasoir sont au cœur d’une intrigue complexe dont on suit avec attention et un certain effroi le déroulement. Une seule certitude, n’en ayez aucune !

Merci aux éditions HarperCollins pour cette lecture.

Préférer l’hiver, Aurélie Jeannin

À distance du monde, une fille et sa mère, recluses dans une cabane en forêt, tentent de se relever des drames qui les ont frappées. Aux yeux de ceux qui peuplent la ville voisine, elles sont les perdues du coin. Pourtant, ces deux silencieuses se tiennent debout, explorent leur douleur et luttent, au coeur d’une Nature à la fois nourricière et cruelle et d’un hiver qui est bien plus qu’une
saison : un écrin rugueux où vivre reste, au mépris du superflu, la seule chose qui compte.
Dans un rythme tendu et une langue concise et précise qui rend grâce à la Nature jusqu’à son extrémité la plus sauvage, Aurélie Jeannin, dont c’est le premier roman, signe un texte comme une mélancolie blanche, aussi puissant qu’envoûtant.

HarperCollins (8 janvier 2020) – 240 pages – Broché (17€) – Ebook (10,99€)

AVIS

Préférer l’hiver, c’est l’histoire d’une rencontre avec une mère et sa fille, mais c’est surtout la connexion immédiate et viscérale avec une plume, un style, une puissance et une poésie dans les mots qui vous happe, vous touche, vous broie et vous noie sous un faisceau de sensations. Les mots coulent de source dans une valse lente, rigoureuse et implacable au rythme de l’hiver, du temps qui passe, de la rudesse de la vie avec son lot de souvenirs, certains heureux, d’autres plus tristes et emplis d’une mélancolie de tous les instants.

Comment supporter le deuil d’un enfant ? Comment accepter que dans un instinct contre-nature, la vie vous arrache une part de vous et renverse l’ordre établi… Un enfant enterre ses parents et non l’inverse… Ce deuil des morts, accompagné de celui des vivants, est puissant et douloureux, mais l’autrice l’évoque toujours avec une retenue salvatrice qui permet aux lecteurs de ne pas sombrer dans la tristesse.

Préférer l’hiver, c’est aussi un huis clos entre une mère et sa fille réunies par le destin, à moins que ce ne soit par le chaos inébranlable de la vie. Ces deux femmes partagent cette même douleur et ce même vide intérieur qui les poussent à trouver un peu de paix dans la quiétude d’une vie coupée de tous. La relation entre la mère et la fille est forte et distante à la fois, les silences ayant autant de poids que les mots. Deux vies qui, malgré quelques frictions, se juxtaposent sans jamais entrer en collision !

Si c’est l’autrice qui nous fait entrer dans l’intimité feutrée de ces deux femmes, c’est bien grâce à la fille que nous apprenons à les connaître. À travers son regard non dénué d’un certain recul, la mère nous apparaît comme une femme hors du temps qui vit à son propre rythme, un rythme effréné que seul un esprit aguerri peut suivre. Intelligente, voire brillante, cette femme semble difficile à cerner dans toute sa complexité ! Elle offre néanmoins une sorte de présence dans l’absence venant autant renforcer le sentiment de solitude de sa fille que le combler…

Quant à la narratrice, sans que l’on s’attache vraiment à elle, elle se dévoile à nous sans fard ni faux-semblant. Mêlant bribes de présent et de passé, elle nous narre ainsi son histoire comme elle le ferait dans un journal intime. Au fil des pages, s’égrènent ses pensées, ses réflexions, ses observations, ses manques, ses blessures physiques et morales, et sa vie dans cette forêt, loin de tout, dans laquelle elle prélève ce dont elle a besoin avec parcimonie et une conscience aigüe de ce qui l’entoure.

La nature prend d’ailleurs une certaine place dans cette histoire lui conférant un aspect nature writing qui, contre toute attente, m’a beaucoup plu. Cela tient probablement au style poétique et immersif de l’autrice. J’ai ainsi parfois eu le sentiment d’entrer dans cette cabane au milieu des bois, et de partager les silences et les douleurs de cette mère et de sa fille dont la relation transcende les liens du sang pour atteindre quelque chose de bien plus fort et puissant…

Deux femmes, une forêt, une cabane, la nature, la végétation, la vie animale… Le masculin est presque exclu de cette vie et quand il apparaît, il nous semble plus nuisible que bienfaiteur. Pour autant, le mâle n’est pas rejeté, mais simplement effacé : plus de mari, plus de fils, plus de futur… juste la vie et l’importance du moment présent.

Il ne se passe rien dans ce récit et tellement de choses à la fois pour celui qui sait écouter. Même le silence de la cabane et de la forêt est comblé par tous ces petits bruits qui permettent de se raccrocher à la vie et de s’ancrer dans une terre pas toujours très tendre, mais dépourvue de cette cruauté bien humaine prompte à frapper et à acculer les plus faibles, plus par avidité et méchanceté que par nécessité. Mais faibles, ces femmes ne le sont pas. Elles affrontent ensemble, comme elles le peuvent, les coups durs de la vie, et ont fini par se créer une vie bien à elles, hors des considérations mercantiles de nos sociétés, loin du brouhaha de la ville et de sa vacuité.

Frappée par l’écriture de ce roman et la poésie qui l’entoure, j’aurais envie de le conseiller à tous, mais je pense néanmoins que sa narration particulière et son rythme ne conviendront pas à tous les lecteurs. N’hésitez donc pas à en lire un extrait avant de vous lancer et de partir à la rencontre de ces deux femmes qui devraient s’imprimer durablement dans votre esprit.

En conclusion, Aurélie Jeannin nous propose un magnifique texte aussi fort et fascinant que la nature qui entoure deux femmes blessées, mais non brisées, dont on suit la vie avec une respectueuse attention. Un rythme calme et intense à la fois pour un huis clos mère/fille, une réflexion sur la nature, le temps qui passe, la solitude, la famille, le deuil, la résilience et la nécessité de vivre l’instant présent sans pour autant se couper de son passé, aussi difficile soit-il. N’est-ce d’ailleurs pas la condition sine qua non pour choisir, en pleine conscience, de préférer l’hiver sans se perdre dans ses frimas ?

Magnifique dans sa singularité, voici un premier roman foudroyant et d’une poésie à la portée quasi philosophique !

Merci aux éditions Harper Collins pour cette lecture.

L’image contient peut-être : texte qui dit ’LIRE EN THEME FÉVRIER 2020 UN LIVRE D'UN AUTEUR’

Argent sale, Karin Slaughter et Lee Child

Argent sale (HarperCollins) par [Slaughter, Karin, Child, Lee]

Je remercie les éditions HarperCollins de m’avoir permis de découvrir Argent sale de Karin Slaughter et Lee Child.

PRÉSENTATION TRADITEUR

Will Trent, du Georgia Bureau of Investigation, se fait engager sous une fausse identité comme main d’œuvre à Fort Knox après avoir découvert que l’individu qu’il soupçonne dans le meurtre d’un policier vingt-deux ans plus tôt, a été embauché pour l’inspection et le nettoyage des lingots d’or qui ont lieu tous les dix ans. Entré dans la célèbre chambre forte, il rencontre enfin le suspect : Jack Reacher.

Karin Slaughter et Lee Child nous offre une rencontre inédite : celle de deux héros cultes, Will Trent et Jack Reacher (le flic dyslexique et l’ancien officier de police militaire) mais aussi celle de deux plumes du polar contemporain. Et si cette première collaboration était le début d’un nouveau tandem du crime ?

HarperCollins (8 janvier 2020) – 160 pages  – Poche (4,90€) – Ebook (1,99€)
Traduction : Alexia Valembois 

AVIS

Argent sale fait, pour la première fois, se rencontrer deux figures emblématiques du monde du polar : Will Trent, agent du Georgia Bureau of Investigation, imaginé par Karin Slaughter, et Jack Reacher, ancien officier de police miliaire, créé par Lee Child.

Je ne connaissais pas ces deux personnages avant de me plonger dans cette nouvelle, ce qui ne m’a pas empêchée de suivre sans problème l’intrigue et de constater que Will et Jack sont deux fortes têtes ! Nous découvrons ainsi Will qui souhaite se faire embaucher, sous une fausse identité, à Fort Knox, le fameux camp militaire américain qui, en plus d’être une forteresse, ressemble à une mini-ville.

Sa motivation officielle : gagner quelques dollars en participant à l’inspection et au nettoyage des lingots d’or. Son véritable objectif : mettre la main sur son suspect dans l’assassinat d’un policier, il y a plus de vingt ans. Or, sa cible n’est personne d’autre que Jack Reacher, lui-même en pleine enquête pour faire le point sur les magouilles qui entachent Fort Knox ! Des magouilles bien plus importantes et organisées que ce que les apparences ne le laissaient présager…

Contre toute attente, les deux infiltrés vont devoir collaborer pour découvrir ce qui se trame réellement à l’intérieur du camp. Une collaboration qui va pousser Will à se poser des questions sur son suspect qui est loin de l’image de mercenaire tueur de flics qu’il s’était imaginé ? Et si finalement, il faisait erreur et que le véritable assassin n’était pas cet homme qu’il a appris à apprécier ou, du moins, à respecter  d’autant qu’au fil de leurs échanges, les deux hommes vont se trouver quelques points communs.

Si l’histoire n’est pas déplaisante et se lit toute seule, j’ai quand même eu le sentiment de « trop peu ». L’intrigue aurait gagné à être étoffée pour soulever un peu plus de tension et de questionnements quant aux tractations secrètes qui secouent Fort Knox et au meurtre non résolu du policier. Pour ma part, j’ai vraiment eu le sentiment que le but de cette nouvelle était bien plus la rencontre entre les deux héros que l’intrigue en elle-même qui reste assez survolée. Les amateurs d’enquêtes complexes et de suspense risquent donc de rester sur leur faim à moins de considérer que nous sommes ici dans une nouvelle sympathique à lire entre deux aventures de Will et/ou de Jack.

J’ai néanmoins apprécié l’immersion dans l’un des endroits les plus secrets du monde, la réserve d’Or américaine de Fort Knox qui a, par le passé, suscité les plus folles rumeurs, et qui bénéficie toujours d’une certaine aura de mystère prompte à affoler l’imagination des complotistes.

Quant à la fin, ou plutôt l’absence de fin, elle laisse entrevoir de nouvelles péripéties pour ce nouveau duo complémentaire qui a toutes les cartes en main pour se lancer dans des aventures trépidantes et pleines d’action. Reste juste à espérer que la prochaine fois, les auteurs nous proposeront un roman étoffé à la place d’une nouvelle intéressante, mais quelque peu frustrante.

En conclusion, manquant de profondeur et d’enjeux pour satisfaire les amateurs d’intrigues complexes et pleines de tension, Argent sale plaira aux personnes appréciant les nouvelles et celles curieuses de découvrir comment deux personnages cultes et hauts en couleur vont arriver à travailler main dans la main pour mettre à jour les magouilles au sein d’un complexe militaire emblématique des États-Unis…

Retrouvez le roman sur le site d’HarperCollins.

 

Fleur de Mamoot : Même pas peur… Emmanuelle Martinez

Je remercie les éditions HarperCollins de m’avoir permis de découvrir Fleur de Mamoot, même pas peur... d’Emmanuelle Martinez.

PRÉSENTATION ÉDITEUR

Faire un selfie au milieu des fumigènes ?
Dire ce qu’elle pense vraiment des enfants des autres ?
Passer Noël en famille sans pouvoir boire une goutte d’alcool ?
MÊME PAS PEUR… Lire la suite

Le corbeau d’Oxford : Une enquête de Loveday & Ryder, Faith Martin

Je remercie les éditions HarperCollins pour m’avoir permis de découvrir Le corbeau d’Oxford : une enquête de Loveday & Ryder de Faith Martin.

PRÉSENTATION ÉDITEUR

Oxford, 1960. Lorsque Sir Marcus Deering, un riche industriel de la région, reçoit plusieurs lettres de menace anonymes, il prend le parti de ne pas s’en inquiéter. Mais bientôt, un meurtre est commis, et les meilleurs éléments de la police d’Oxford sont mobilisés.
La toute jeune policière Trudy Loveday rêverait de participer à une affaire aussi importante, mais ses supérieurs coupent rapidement court à ses ambitions. Écartée de l’enquête et chargée d’assister le brillant mais peu amène Dr Clement Ryder, médecin légiste, sur une affaire classée, elle se retrouve pourtant très vite au cœur d’une énigme qui pourrait bien la mener sur la piste du mystérieux corbeau d’Oxford…

HarperCollins (13 novembre 2019) – 352 pages – Broché (14,90€) – Ebook (9,99€)
Traduction : Alexandra Herscovici-Schiller

AVIS

Trudy Loveday, policière stagiaire de presque 20 ans, n’est pas prise au sérieux par sa hiérarchie et ses collègues malgré son dynamisme et sa bonne volonté. Difficile de se faire une place en tant que femme dans une Angleterre des années 60 encore très patriarcale et pleine de « bons sentiments » envers le sexe faible. Entre une mère qui aurait rêvé sa fille en épouse et mère de famille comblées et un supérieur qui ne sait que faire d’elle, Trudy Loveday va donc devoir faire ses preuves ! Chose dont elle est bien consciente et qui est loin d’entamer sa motivation et son ambition, bien au contraire.

Et ça tombe bien, l’opportunité de montrer ce qu’elle vaut ne va pas tarder à arriver, et prendre la forme d’une collaboration avec le Dr Clement Ryder, un brillant chirurgien qui, en raison d’une maladie, s’est reconverti en coroner. Il profite de l’affaire du corbeau d’Oxford, qui s’est soldée par la mort d’un homme, pour encourager la police à enquêter de nouveau sur le décès, il y a presque cinq ans, d’une jeune femme que la victime aurait fréquentée. Une ancienne histoire qui, pour le docteur, sent le mensonge à plein nez et sur laquelle il est bien décidé à faire toute la lumière. Mais les deux affaires sont-elles vraiment liées ?

C’est que ce que vous découvrirez en dévorant ce roman, mais je peux néanmoins vous dire que j’ai apprécié la manière dont l’auteure imbrique les différents éléments de son récit. Elle pousse habilement les lecteurs à s’interroger sur cette histoire de corbeau qui menace un industriel anglais et l’exhorte à se racheter quand le pauvre bougre ne comprend pas de quoi on l’accuse. La seule chose qui lui vient à l’esprit est une vieille affaire pour laquelle sa responsabilité n’est pourtant pas directement engagée ! Non, décidément, cette histoire n’a pas de sens et serait même risible si elle n’avait pas de si graves et funestes conséquences…

En parallèle, on suit l’enquête de Trudy et du Dr Ryder qui fouinent dans les secrets bien gardés d’une riche famille anglaise qui pourrait être liée à l’assassinat perpétré par le corbeau. J’ai développé d’emblée une certaine sympathie pour ce docteur, un homme respecté, bien que craint, qui ne tombe jamais dans l’apitoiement malgré sa maladie qu’il s’évertue, contre vents et marées, à garder secrète. Intelligent, implacable, intraitable, consciencieux à l’extrême, épris de justice et de vérité, le portait n’est pas forcément celui d’un boute-en-train, mais derrière le côté dur et autoritaire, se cache un homme honnête, authentique et non dénué d’une certaine sensibilité.

Face à un homme avec une telle force de caractère, il fallait quelqu’un comme Trudy, une femme intelligente, volontaire, avec la tête sur les épaules, du répondant et une volonté de fer. Consciente de la nécessité de tenir tête au docteur et de ne pas se laisser marcher sur les pieds pour obtenir son respect, elle n’hésitera ainsi pas à affirmer son point de vue et à lui prouver que loin d’être une épine dans le pied comme le pense son supérieur, elle constitue un atout dans leur enquête commune.

Ce duo intergénérationnel, en plus d’être terriblement attachant, fonctionne à merveille et fait des étincelles, les deux protagonistes étant parfaitement complémentaires. Le docteur prend ainsi la jeune femme sous son aile tempérant son enthousiasme quand il lui fait perdre de vue la cohérence des indices tout en l’encourageant à prendre confiance en elle. Quant à Trudy, elle lui apporte ce dynamisme qui lui fait défaut et ce sang frais qui lui permet d’aborder les choses sous un angle nouveau.

Le roman se lit très vite, le suspense étant bien présent, la galerie de personnages variée et intrigante, l’histoire menée à bon rythme et la plume de l’autrice assez agréable, fluide et efficace pour vous donner envie de tourner les pages les unes après les autres jusqu’au dénouement tant attendu. J’avais anticipé l’identité du corbeau, mais cela ne m’a pas dérangée d’autant que je n’avais, en revanche, pas compris à quel point la situation était tordue et malsaine. Il y a des personnes vraiment prêtes à tout par amour, quel que soit le sens que l’on puisse donner à ce mot.

En conclusion, en plus de nous offrir une enquête rythmée, prenante et immersive dans une Angleterre des années 60 ne manquant pas de charme, bien qu’ayant des progrès à faire en matière d’égalité des sexes, l’autrice introduit un duo d’enquêteurs particulièrement attachant, complémentaire et complice dont on prend plaisir à suivre les échanges et les investigations. Parce que rien ne pourra entraver l’enthousiasme et l’ambition de Trudy et la volonté du Dr Ryder de faire triompher la justice et la vérité, quelque chose me dit que nous n’avons pas fini d’entendre parler de ce duo de choc !

Retrouvez le roman sur le site des éditions HarperCollins

Cléopâtre, Alberto Angela

Je remercie les éditions HarperCollins de m’avoir permis de découvrir Cléopâtre d’Alberto Angela.

PRÉSENTATION ÉDITEUR

Revivre l’Histoire, sur les traces de Cléopâtre

Peu de femmes peuvent se vanter d’avoir autant marqué les esprits que Cléopâtre. La dernière reine d’Égypte antique a séduit les puissants mais a surtout fait de son nom un symbole de puissance. Alberto Angela, vulgarisateur de génie, nous entraîne sur les pas de cette femme d’exception. Dans un monde antique dominé par les hommes, elle a permis au royaume d’Égypte de connaître une expansion fulgurante. Femme de pouvoir, douée dans l’art de la négociation comme dans celui de la guerre, elle est une grande stratège et une figure incroyablement visionnaire. Si, après deux mille ans, elle continue de nous fasciner et de nous inspirer, c’est peut-être parce qu’au-delà des images et du fantasme, elle est le visage de la modernité.

HarperCollins (2 octobre 2019) – 432 pages – Broché (22€) – Ebook (14,99€)
Traduction : Marc Lesage

AVIS

S’il y a bien une femme qui a su traverser le temps en gardant le même éclat dans l’imaginaire collectif, c’est bien Cléopâtre. Et c’est ce personnage historique fascinant, encore auréolé d’un certain mystère, qu’Alberto Angela se propose de mettre à notre portée, non pas en faisant le détail de sa vie entière, mais en se focalisant sur une période importante de l’Histoire qui a, d’une certaine manière, façonné notre monde.

Nous suivons ainsi notre auteur, que l’on pourrait sans aucun doute qualifier de doux conteur, dans les couloirs du temps, entre 44 avant J.-C. et l’an 30 avant  J.-C. Quatorze ans, une période qui peut sembler ridicule au regard de l’histoire du monde, mais qui, comme vous le découvrirez dans le livre, mérite toute notre attention notamment par les enjeux militaires et géopolitiques dont elle a été le témoin, si ce n’est le théâtre.

L’auteur nous immerge ainsi complètement dans le passé où l’on découvre, comme si nous y étions, la vie à Rome avec des habitudes parfois surprenantes. Il valait mieux, par exemple, ne pas rester trop près des fenêtres sous peine de recevoir certaines substances sur la tête. Mais il évoque également des faits et événements historiques qui, pour certains, sont plus ou moins connus de tous : le complot le plus célèbre de l’histoire conduisant à l’assassinat de Jules César, le chaos régnant à Rome suite à la mort de son dictateur qui a semblé rester sourd aux signes annonçant le drame, les faits de gloire de Marc Antoine et son alliance/rivalité avec Octavien, les vengeances implacables, les alliances/mésalliances politiques et stratégiques, les trahisons, la puissance de l’armée romaine sans oublier la déchéance du couple emblématique formé par Cléopâtre et Marc Antoine…

L’auteur prend le temps de poser le contexte historique dans lequel Cléopâtre a dû évoluer et s’imposer, un monde dur et machiste fait par les hommes et pour les hommes dans lequel la femme n’a qu’une place subalterne, quand elle en a une. Il en résulte une certaine frustration puisque j’ai eu le sentiment que l’auteur nous donnait bien plus d’informations sur la politique de l’époque et la vie de César et de Marc Antoine que sur celle de Cléopâtre. Il faut dire que vu le travail de sape des Romains et de leurs penseurs et historiens qui se sont évertués à la discréditer et à la salir, difficile d’en dessiner un portrait aussi précis que celui des hommes de sa vie.

Cela n’empêche néanmoins pas de sentir avec force l’influence de la mythique souveraine dans cette histoire qui est en marche. Forte, intelligente, cultivée, pugnace, fine stratège, et définitivement en avance sur son temps, Cléopâtre est loin de se réduire à l’image de catin de haut vol dans laquelle certains ont essayé de l’enfermer. Elle a su profiter au maximum de ses multiples atouts que ce soit son charme couplé à une personnalité hors norme, ses talents d’oratrice ou encore sa fortune, pour assurer son avenir, celui de ses enfants et de son royaume sur lequel elle veillera jusqu’à la fin… L’approche multiculturelle de son règne, qui rompt avec la tradition familiale et qui lui permettra de s’attirer la sympathie de son peuple, ainsi que sa capacité à se projeter dans l’avenir font d’elle une souveraine d’exception qui a marqué à jamais l’histoire.

Si cette biographie romancée est richement documentée comme l’en atteste la longue bibliographie, on appréciera le travail personnel de l’auteur qui comble avec intelligence et sérieux les failles ou les ombres de l’histoire. Impossible de connaître parfaitement tout ce qui est arrivé durant ces quatorze ans mouvementés, mais ce qui est certain, c’est que la version proposée par l’auteur, en plus d’être cohérente et plausible, est amenée avec soin et une certaine passion. Loin de se contenter de nous narrer méthodiquement et froidement les événements, Alberto Angela y met de l’émotion nous plongeant dans les pensées et sentiments des protagonistes. Un point qui fait toute la différence et qui rend le récit passionnant. De fil en aiguille, on se laisse ainsi happer par les événements avec cette impression de ne pas lire un livre, mais de regarder une fresque historique et amoureuse sur grand écran.

Bonus fort appréciable, les différentes cartes proposées en fin d’ouvrage qui viennent confirmer l’impression de qualité que l’on ressent dès la prise en main du livre.

En conclusion, d’une plume fluide, parfois théâtrale, voire dramatique, comme a pu l’être l’Antiquité, l’auteur nous immerge dans le passé, de la Rome antique en proie au chaos suite à l’assassinat de César à cette opulente Égypte dirigée d’une main de fer par Cléopâtre, une jeune souveraine qui a fasciné et qui fascinera encore des générations entières. Immersif, documenté et fascinant, voici un voyage historique que je ne peux que vous inviter à effectuer. Vous y découvrirez un monde en mouvement où les plus grandes histoires d’amour font face aux plus grands complots… Plus qu’un roman, une magnifique épopée marquée à tout jamais du sceau d’une grande souveraine !

Découvrez un extrait/retrouvez le roman sur le site des éditions HarperCollins.

Premières lignes #88 : Cléopâtre, Alberto Angela

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Le principe de ce rendez-vous initié par Ma lecturothèque est de citer, chaque semaine, les premières lignes d’un livre.


Je lis très peu de livres d’histoire, mais quand j’ai vu que les éditions HarperCollins allait sortir un roman sur Cléopâtre, je ne pouvais qu’avoir envie de le découvrir !

« Revivre l’Histoire, sur les traces de Cléopâtre

Peu de femmes peuvent se vanter d’avoir autant marqué les esprits que Cléopâtre. La dernière reine d’Égypte antique a séduit les puissants mais a surtout fait de son nom un symbole de puissance. Alberto Angela, vulgarisateur de génie, nous entraîne sur les pas de cette femme d’exception. Dans un monde antique dominé par les hommes, elle a permis au royaume d’Égypte de connaître une expansion fulgurante. Femme de pouvoir, douée dans l’art de la négociation comme dans celui de la guerre, elle est une grande stratège et une figure incroyablement visionnaire. Si, après deux mille ans, elle continue de nous fasciner et de nous inspirer, c’est peut-être parce qu’au-delà des images et du fantasme, elle est le visage de la modernité. »

PREMIÈRES LIGNES

LE CRÉPUSCULE D’UNE RÉPUBLIQUE
15 mars 44 av. J.-C.

Elle a le regard tourné vers un horizon lointain, très lointain, comme si elle voulait se perdre dans des sensations et des souvenirs aussi doux qu’apaisants.

Un voile en soie gonflé par le souffle d’une brise légère encadre son visage. Il se serait déjà envolé si elle ne le tenait pas d’une main ferme. C’est le seul signe de force de ce corps nu, délicatement allongé dans le creux d’un coquillage gigantesque. La faible lumière de l’aube ne dessine pas encore ses contours. Au reste, ce serait impossible : sa beauté est constituée de milliers de carreaux de pierre qui composent ces formes arrondies. Celles de Vénus. La mosaïque est progressivement caressée par un bruissement. Une tunique vaporeuse approche du centre de la salle en frôlant le sol.

Et vous, ce livre vous tente-t-il ?
Retrouvez un extrait sur le site des éditions HarperCollins