Les cicatrices, Claire Favan

Les cicatrices : le nouveau thriller de la plus machiavélique des autrices du genre (HarperCollins) par [Favan, Claire]

Centralia, État de Washington. La vie d’Owen Maker est une pénitence. Pour s’acheter la paix, il a renoncé à toute tentative de rébellion.
En attendant le moment où il pourra se réinventer, cet homme pour ainsi dire ordinaire partage avec son ancienne compagne  une maison divisée en deux. Il est l’ex patient, le gendre idéal, le vendeur préféré de son beau-père qui lui a créé un poste sur mesure. Un type docile. Enfin, presque. Car, si Owen a renoncé à toute vie sociale, il résiste sur un point : ni  le chantage au suicide  de Sally ni  les scènes qu’elle lui inflige quotidiennement  et qui le désignent comme bourreau aux yeux des autres ne le feront revenir sur sa décision de se séparer d’elle.
Mais, alors qu’une éclaircie venait d’illuminer son existence, Owen est vite ramené à sa juste place. Son ADN a été prélevé sur la scène de crime d’un tueur qui sévit en toute impunité  dans la région, et ce depuis des années. La police et le FBI sont sur son dos. L’enfer qu’était son quotidien n’est rien  à côté de la tempête qu’il s’apprête à affronter.

HarperCollins (4 mars 2020) – 368 pages – Broché (20€) – Ebook (12,99€)

AVIS

Afin d’étayer mon avis, j’ai évoqué certains points qui, sans être des spoilers, peuvent vous mettre sur la piste de certaines révélations. Je vous invite donc à lire ma chronique plus tard si vous souhaitez lire ce roman avec un maximum d’effet de surprise.

Retrouvé à moitié mort, il y a de nombreuses années, Owen, incapable de se souvenir de son passé, s’est bâti une nouvelle vie, celle un homme serpillère qui endure stoïquement les frasques d’une ex-femme complètement dérangée qui refuse de reconnaître leur séparation. Crises de jalousie et de démence, pression psychologique, violences physiques, menaces et tentatives de suicide rythment ainsi son quotidien.

L’autrice nous brosse ici le portrait d’un homme dévasté dont l’attitude de victime peut exaspérer et donner envie de le secouer pour qu’il réagisse et mette fin à toute cette folie. Mais si Owen m’a parfois agacée par sa passivité, j’ai également compris ses difficultés à se sortir de la situation intenable dans laquelle son ex-femme et sa belle-famille l’ont enfermé. Son envie de reprendre les rênes de sa vie se confronte ainsi à la peur viscérale d’avoir le suicide de son ex-femme sur la conscience…

Sa vie va néanmoins prendre une tournure encore plus dramatique quand son ADN va être trouvé sur la scène de crime d’un tueur en série qui n’avait plus fait parler de lui depuis des années. Sous le joug d’une ex-femme hystérique, en proie à des cauchemars de plus en plus violents et réalistes, et suspecté par un agent du FBI retors et enfermé dans le carcan de ses certitudes et de ses espoirs, Owen perd pied ! Il pourra heureusement compter sur le soutien de la petite étincelle de bonheur qui a récemment fait irruption dans sa vie, Jenna, une policière qui croit en lui et en son innocence…

Intense, c’est le premier mot qui me vient à l’esprit pour qualifier ce thriller qui joue à merveille sur les faux-semblants, les apparences et les mensonges. L’autrice pousse les lecteurs dans leurs retranchements jouant avec leur empathie et leurs émotions pour mieux les tromper et les détourner de la vérité. Avec elle, les victimes deviennent bourreaux et les bourreaux finissent par être victimes de leur propre ignominie. La vengeance est donc au cœur de cette histoire et prend des proportions inimaginables, du moins, pour un esprit sain.

La survie du corps signifie-t-elle automatiquement celle de l’esprit ou y a-t-il un seuil d’horreur et de douleur à partir duquel l’âme humaine se perd pour emprunter des chemins tortueux ? Une question, parmi tant d’autres, qui vous viendra à l’esprit à mesure que des scènes d’une grande violence prennent vie sous vos yeux. Alors que l’autrice n’entre pas forcément dans les détails, elle arrive à nous faire ressentir toute la souffrance et le désespoir des victimes d’un être abject qui n’hésite pas à kidnapper, à torturer et à violer pour assouvir ses plus bas instincts. Si certaines femmes vacillent rapidement, d’autres survivent des années et offrent cette résistance qui excite et stimule tellement leur bourreau.

Suivre la captivité de ces femmes réduites à l’état d’objet sexuel se révèle difficile, mais je n’ai jamais eu le sentiment que l’autrice tombait dans la surenchère. D’ailleurs, bien que je sois sensible, j’ai trouvé le livre supportable à l’exception, peut-être, d’une scène de torture qui m’a fait quelque peu vaciller par son réalisme. Mais je l’ai trouvée bien amenée pour faire ressentir aux lecteurs le degré de haine atteint par un personnage. À cet instant, on a la certitude que son esprit est brisé et qu’il a atteint un point de non-retour. Est également soulevée la question de l’éducation et de l’impact qu’un être pervers et malsain peut avoir sur un esprit en construction…

Le roman, alternance de points de vue et de chapitres courts, se lit très rapidement d’autant que l’autrice arrive à ménager son suspense jusqu’à la fin et à doser sa tension de manière à la rendre constante. À chaque fois que l’on pense avoir touché du doigt le dénouement final, elle relance l’intérêt du lecteur en apportant un nouvel éclairage sur l’intrigue, l’enquête ou les personnages. Bien que j’aie anticipé certains rebondissements, j’ai apprécié d’être transportée dans une histoire complexe dont il est bien difficile de dénouer tous les fils avant d’avoir tourné la dernière page.

En plus d’une intrigue efficace qui ne souffre d’aucun temps mort, Claire Favan offre une galerie de personnages variée que l’on sent, pour la plupart, au bord du gouffre : certains en raison de leurs illusions les enfermant dans un enfer personnel et/ou professionnel, d’autres parce qu’ils sont véritablement en enfer ou, à l’inverse, parce qu’ils n’ont jamais su profiter de leur liberté retrouvée. Nul besoin de murs pour être emprisonné…

En conclusion, Les cicatrices est un thriller particulièrement efficace qui vous plongera sans douceur et avec un réalisme déconcertant dans les plus sombres recoins de l’âme humaine et de sa perversité. Souffrance, mensonges, faux-semblants et personnages sur le fil du rasoir sont au cœur d’une intrigue complexe dont on suit avec attention et un certain effroi le déroulement. Une seule certitude, n’en ayez aucune !

Merci aux éditions HarperCollins pour cette lecture.

24 réflexions sur “Les cicatrices, Claire Favan

  1. Pour une fois, je n’ai pas lu ta critique car j’ai lu ton annonce en orange. En revanche, j’ai lu ton dernier paragraphe de ressenti général ! Je l’ai commandé sur Vinted la semaine dernière. Je le lirai donc bientôt. ^^ En tout cas, j’ai hâte de me laisser emporter par ce récit qui t’a donné autant satisfaction !!!

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  2. Il a l’air bien, c’est la deuxième bonne chronique que je lis sur ce livre… mais j’ai peur que ce soit un peu trop dur pour l’âme sensible que je suis. Déjà que j’ai deux livres de Giébel dans ma PAL et que j’ai peur d’avoir peur… mdr ^^

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  3. Si l’auteure ne tombe pas dans la surenchère c’est cool. C’est ce qu’il faut à mon avis. Du gore pour du gore n’amène jamais rien de bon. 🙂
    Merci pour ta chronique. Je pense que je vais me lancer dans la lecture une fois les librairies réouvertes

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