Arrowood, Mick Finlay

Je remercie les éditions HaperCollins pour m’avoir permis de découvrir Arrowood de Mick Finlay.

PRÉSENTATION ÉDITEUR

1895 : Londres a peur. Un tueur terrorise la ville. La police, débordée, arrive à un point de rupture. Tandis que les bourgeois désemparés se tournent vers Sherlock Holmes, dans les quartiers surpeuplés du sud de Londres, les gens s’en remettent à un homme qui méprise Holmes, sa clientèle fortunée et ses méthodes de travail voyeuristes. Cet homme, c’est Arrowood – psychologue autodidacte, ivrogne occasionnel, et détective privé. Quand un homme disparaît mystérieusement, Arrowood et son comparse Barnett se lancent dans une mission de taille : capturer Mr Cream, le malfrat le plus redouté de la ville.

HarperCollins (février 2019) – 352 pages – Poche (7,90€)

 

AVIS

L’un analyse les indices et fait des déductions, l’autre lit les émotions et en tire des conclusions. Deux approches assez différentes pour deux personnages qui semblent quelque peu incompatibles, du moins, si l’on se fie à la haine qu’Arrowood voue à Sherlock Holmes bien qu’il soit fort probable que ce dernier ne connaisse même pas l’existence de ce détective des bas-fonds de Londres.

J’ai adoré voir planer l’ombre de Sherlock Holmes dans le récit. Le célèbre détective n’intervient pas, mais on entend régulièrement parler de ses exploits, ce qui a ravi la fan de l’œuvre de Sir Arthur Conan Doyle en moi. Mais la manière dont tout le monde s’extasie devant le célèbre détective a tendance à rendre complètement fou Arrowood qui est loin de partager le même enthousiasme. Faisant preuve d’une mauvaise foi à toute épreuve, il se complaît donc, à la moindre occasion, à décrédibiliser Sherlock Holmes qu’il considère, dans le meilleur des cas, comme extrêmement chanceux, et dans le pire, comme complètement incompétent !

Une vision que je ne partage pas mais qui m’a fait sourire ayant parfois l’impression de voir un enfant refusant d’admettre la vérité : le talent de Sherlock Holmes est sans commune mesure avec le sien. Cela ne l’empêche pas d’avoir de temps en temps quelques affaires à se mettre sous la dent comme celle que lui confie une cliente d’origine française qui souhaiterait retrouver son frère. Une enquête, à première vue, assez banale si ce n’est que le jeune Français travaillait dans l’établissement d’un homme peu fréquentable avec lequel Arrowood et son assistant, Barnett, ont déjà eu maille à partir. C’est donc en marchant sur des œufs et en espérant que le ciel ne leur tombe pas sur la tête que les deux comparses vont se lancer à la recherche de Thierry, ou de Terry pour les Anglais.

Suivant l’un après l’autre les indices qui se trouvent sur leur route, Arrowood et Barnett vont finir par se trouver devant un tableau d’ensemble peu cohérent qui va mettre leur patience à rude épreuve d’autant que leur cliente semble ne pas avoir été complètement honnête avec eux… Plus on avance dans l’intrigue, plus les choses se complexifient pour le plus grand bonheur des lecteurs qui tournent alors avec avidité les pages les unes après les autres. On se laisse donc volontiers porter par l’histoire qui met à nu aussi bien les agissements d’un horrible personnage et de ses complices, pas tous forcément très volontaires, que d’un groupe défendant ses idéaux politiques de manière plutôt radicale. Cet aspect politique est finalement assez peu présent, mais je l’ai trouvé très intéressant puisqu’il évoque une partie sombre de l’histoire britannique.

Bien construit, ce roman se lit très vite d’autant qu’en plus d’une l’intrigue prenante, il ne manque pas d’atouts : une plume immersive mais très accessible, une narration à la première personne à travers la voix chaleureuse de Barnett, de nombreux dialogues qui sonnent très « vrais »…. Il faut dire que, page après page, l’auteur nous plonge avec talent dans cette Angleterre victorienne en se concentrant non pas sur le Londres des beaux quartiers, mais sur le Londres de Jack L’éventreur, une ville gangrénée par la misère extrême, la crasse, la méfiance vis-à-vis des étrangers, la prostitution, la corruption, l’alcool, la violence… Un tableau assez sombre dans lequel se fond à merveille Arrowood qui, lui-même, n’est pas exempt d’une certaine crasse au sens propre du terme puisque ce dernier n’est pas un acharné de l’hygiène, qu’elle soit corporelle ou de vie. Mais c’est vrai qu’à cette époque, c’est loin d’être le seul…

Passionné par la psychologie, domaine dans lequel il évolue en autodidacte, Arrowood est un peu la tête pensante du duo quand il s’agit d’élaborer des plans et de faire des liens entre des individus et des événements. Ses talents bien que réels restent, néanmoins, moins spectaculaires que ceux de Sherlock Holmes, ce qui les rend peut-être plus réalistes. Sans être foncièrement désagréable, ce n’est pas un personnage pour lequel j’ai développé énormément de sympathie même s’il m’a parfois touchée notamment par l’affection qu’il porte à Neddy, un gamin des rues que j’ai, pour ma part, adoré. Courageux et volontaire, cet enfant fait de son mieux pour subvenir aux besoins de sa famille tout en vouant une sincère admiration à Arrowood, une admiration que notre détective tend trop souvent à exploiter à mon goût…

J’espère retrouver le jeune garçon dans le deuxième tome tout comme Ettie, la sœur du détective qui possède une certaine force de caractère. À cet égard, j’ai été agréablement surprise de l’évolution du personnage qui, je l’espère, prendra encore plus d’importance par la suite. Si Arrowood ne m’a guère impressionnée par sa lecture des émotions, j’ai été assez époustouflée par la manière dont Barnett n’hésite pas à se lancer dans la bataille quitte à donner de sa personne. Et puis il m’a beaucoup touchée pour une raison que je vous laisserai le soin de découvrir par vous-mêmes.

Chose intéressante, la relation entre Arrowood et Barnett me semble beaucoup plus équilibrée que celle entre Holmes et Watson. Bien que fidèle à Arrowood, Barnett, conscient des forces et faiblesses du détective, l’admire, mais ne l’idolâtre pas, ce qui lui permet d’émettre les réserves nécessaires pour leur propre sécurité. Et c’est probablement ce relative équilibre dans les rapports entre les deux comparses ainsi que leur totale complémentarité qui rendent leur relation/collaboration efficace, réaliste et intéressante…

En conclusion, à travers une enquête rythmée et prenante, l’auteur nous plonge avec un réalisme désarmant dans les bas-fonds de Londres soulevant, au passage, la vase qui semble étouffer la ville. Les apparences pouvant être trompeuses, il faudra bien à Arrowood, entre deux diatribes contre Sherlock Holmes, tout son talent pour démêler le vrai du faux, et à son fidèle associé, Barnett, tout son courage pour concrétiser des plans parfois un peu risqués… Voici un livre que je recommande à tous les amateurs d’enquêtes policières se déroulant dans cette Angleterre victorienne à l’atmosphère si particulière.

Retrouvez/feuilletez un extrait du roman sur le site des éditions HarperCollins.

8 réflexions sur “Arrowood, Mick Finlay

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