J’ai découvert par hasard le livre audio Les loyautés de Delphine De Vigan, et j’ai eu tout de suite envie de l’écouter, certaine de passer un moment fort et riche en émotion comme avec chaque livre de l’autrice…
PRÉSENTATION ÉDITEUR
« Chacun de nous abrite-t-il quelque chose d’innommable susceptible de se révéler un jour, comme une encre sale, antipathique, se révélerait sous la chaleur de la flamme ? Chacun de nous dissimule-t-il en lui-même ce démon silencieux capable de mener, pendant des années, une existence de dupe ? »
Audible (14 mars 2018) – 4 heures et 7 minutes – CD (18,50€)
AVIS
Je ne pensais pas vous parler de ce roman ayant toujours beaucoup de mal à évoquer les livres de Delphine de Vigan que j’aime pourtant beaucoup. Trop bouleversants et puissants, ses ouvrages ont tendance à tellement résonner en moi que je n’arrive pas vraiment à prendre le recul nécessaire pour les analyser et dépasser le stade primaire de l’émotion.
Je tenais néanmoins à vous dire quelques mots sur cette histoire qui parle de ce sentiment de loyauté qui nous pousse à cautionner des comportements qu’on n’approuve pas toujours, mais qu’il est parfois difficile de remettre en question. Comment trahir la confiance d’un ami, quitter un être dont le secret puant vous rebute et vous pousse à mettre en perspective toute votre vie, que faire avec cette amie qui s’enlise dans ses obsessions, et comment ne pas se trahir soi-même en étant plus loyal aux idées d’autrui qu’aux siennes ?
Des questions, parmi tant d’autres, que l’on se pose en suivant le quotidien d’une galerie variée de personnages : une maîtresse d’école qui projette un passé douloureux sur l’un de ses élèves, deux jeunes amis qui sont confrontés bien trop tôt à une addiction d’adulte, des parents qui, englués dans leur propre peine, en deviennent maltraitants avec leur enfant, une femme qui se perd dans son mariage…
Certains personnages sont plus touchants et marquants que d’autres à l’instar d’Hélène qui, en croyant reconnaître des signes de maltraitance sur l’un de ses élèves, Théo, met le pied dans un engrenage infernal. Maltraitée elle-même dans son enfance, elle finit par confondre son propre passé avec le sort de cet élève au point d’avoir des comportements inappropriés qui mettront en péril sa carrière. Mais plus grave, en se décrédibilisant auprès de ses collègues et de sa direction, Hélène n’aura plus vraiment les moyens d’apporter cette attention et cette aide dont Théo semble avoir terriblement besoin.
Car oui, Théo va mal, mais pas forcément pour les raisons que cette femme, tellement humaine et touchante dans sa vulnérabilité, imagine. Non, il n’est pas roué de coups chaque soir, mais il est victime d’une violence plus ordinaire et destructrice : celle de parents dont la route s’est séparée de manière fracassante ! Pris en étau entre une mère incapable de pardonner le départ de son mari et qui en fait payer le prix à son fils, et un père paumé devenu alcoolique, Théo a dû développer sa propre manière de survivre…
L’autrice aborde ici un thème très rare en littérature, l’alcoolisme infantile, et le fait avec beaucoup de sensibilité et de réalisme. Elle plonge le lecteur aux côtés de ce jeune garçon dont le comportement annonce un futur drame ou du moins, une descente aux enfers que sa jeunesse rend effroyable. Quel gâchis ! C’est le sentiment que l’on ressent à la vue de ce garçon livré à lui-même et dont personne, à part sa maîtresse et son meilleur ami, ne semble voir la détresse. Quand les garçons de son âge pensent à s’amuser avec leurs amis, Théo pense lui à sa prochaine beuverie et à cet alcool qui embrumera son esprit… Le besoin d’alcool devient impérieux, son équilibre de plus en plus instable, et son détachement au monde de plus en plus inquiétant. Jusqu’où devra aller Théo pour qu’un adulte réagisse ?
Bien que très dure, j’ai adoré cette histoire sublimement écrite, la plume de l’autrice mêlant avec brio froideur et réalisme tout en suscitant chez ses lecteurs une implication totale. On entre dans cette lecture sans retenue et on ne la quitte pas avant d’en avoir découvert le dernier mot.
Et c’est là que la frustration commence, l’autrice concluant son livre de manière brutale, un peu comme si elle nous éjectait sans préavis de son récit, et donnait le droit à ses personnages de reprendre le cours de leur vie sans témoin. Que cette fin ouverte m’a décontenancée ! Même actuellement, je ne saurais dire si je la trouve brillante ou simplement frustrante. Ce qui est certain, c’est qu’elle est marquante et frappante à l’image de ce drame qui se construit inexorablement sous nos yeux…
Terminons cette chronique par la partie audio qui ici m’a complètement convaincue, les acteurs donnant vie aux personnages avec beaucoup de force et de réalisme. En collant parfaitement au texte de Delphine de Vigan dont on ressent alors toute la puissance évocatrice de la plume, les acteurs offrent à ce récit déjà poignant une émouvante et très belle interprétation dont vous ne pourrez que ressortir troublés et touchés. À lire, mais surtout à écouter !
Je trouve justement que la fin laisse le lecteur choisir entre plusieurs possibilités et c’est aussi ce que j’ai aimé (il me semble car je l’ai lu il y a longtemps). Pour la partie audio, tu parle de plusieurs acteurs…il n’y a pas comme lors d’une lecture un seul narrateur ?
Merci pour ta réponse.
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Je comprends ce que tu veux dire pour la fin, mais je préfère en général être fixée quant au devenir des personnages. Mais ce qui m’a perturbée ici, c’est que je l’ai trouvée trop brutale. J’ai vérifié plusieurs fois le CD pour voir s’il n’y avait pas un problème…
Dans ce livre audio, trois acteurs lisent le roman, ce qui apporte un vrai plus à l’intrigue. Tu pourras voir leur photo sur la couverture en début d’article 🙂
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Je suis restée sur ma faim, car c’était charge à moi d’imaginer une fin, 😕 et je préfère que ce rôle reste à l’auteur.
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Je comprends, j’ai eu ici le même sentiment même si avec du recul, je me dit que le but de l’autrice était peut-être plus de montrer ce qui a mené à la situation finale que l’après…
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C’est bien possible. Mais moi j’aime bien qu’il y ait un début, un milieu, et une fin. :)))
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J’aime beaucoup la plume de De Vigan, mais je ne connais pas ce roman. Il a l’air d’avoir bien des atouts sous ses pages !
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Il est vraiment poignant comme souvent avec les textes de l’autrice…
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Tout à fait d’accord sur les écrits de De Vigan !
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J’ai bien aimé celui-là. Par contre, le dernier : bof !
Bon dimanche.
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Ce roman est vraiment prenant…
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Oui, la fin ouverte est particulière, et donne presque l’impression qu’il manque un morceau au livre.
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C’est exactement ça, j’ai vraiment cru au début que le CD avait un problème…
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Avec toi, nous sommes quatre à avoir eu cette impression.
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