Je remercie Babelio et les éditions Steinkis de m’avoir envoyé Les enfants d’abord : Janusz Korczak, une vie au service de l’éducation et des droits de l’enfant de Stéphane Tamaillon et Priscilla Horviller en échange de mon avis. Lire la suite
Archives de Tag: Enfant
Extraordinaires enfants de l’écume des vents, Karin Serres et Katy Sannier (illustrations)
Ranimer une légende du fond des âges ? Facile : à la pointe du Raz, là où la terre finit dans l’océan, là où les vents sucrés et salés soufflent sur la lande, c’est le rôle des enfants et des poissons volants !
Locus Solus (18 juin 2021) – 48 pages – 14€
Ceux qui restent, Josep Busquet (scénariste) et Alex Xöul (illustrateur)
Un soir, le jeune Ben part sauver un royaume magique d’un terrible danger, de la même manière que Wendy et ses frères suivirent Peter Pan. Mais ce qui ressemble à un rêve d’enfant se transforme en cauchemar pour ses parents. Ben a disparu. Ses parents préviennent la police mais personne ne peut imaginer la réalité : leur enfant affronte mille dangers dans son royaume imaginaire. Mais un jour, il revient. Parents, police et psys pensent que Ben nie la réalité de ce qu’il a vécu. Avant de disparaître à nouveau. Seule une association regroupant des parents qui vivent les mêmes turpitudes pourra sans doute leur venir en aide…
Éditions Delcourt (21 mars 2018) – 128 pages – 19,99€
Le coffre enchanté de Jean-François Chabas et David Sala
Remonté par un pêcheur des profondeurs de la mer, un gros coffre en métal luisant suscite l’avidité de l’Empereur cupide, toujours en quête d’un trésor supplémentaire. Seulement voila : rien ni personne ne parvient à l’ouvrir…
Casterman (05/10/2011) – 15,90€ – 24 pages
AVIS
J’ai tout de suite été attirée par ce très bel objet-livre avec son beau de travail de découpe et sa couverture enchanteresse…
Un jour, un pêcheur remonta un coffre de métal dans ses filets. Bien que cela ne se mange pas, il ne fut pas mécontent de sa découverte à un petit détail près : impossible de l’ouvrir ! Un problème dont il fut fort vite débarrassé quand le capitaine de la garde de l’Empereur décida que ce coffre constituerait un parfait présent pour l’Empereur….
Malheureusement pour lui, il ne réussit pas non plus à ouvrir cet énigmatique coffre, ce qui ne fut guère au goût de l’Empereur qui, après l’avoir châtié de dix coups de fouet, fit diligenter différentes personnes pour résoudre le problème. Mais ni le savoir-faire d’un serrurier, ni la magie et encore moins la force brute n’arrivèrent à venir à bout de la serrure récalcitrante. Et si la ruse était encore la meilleure manière de satisfaire un Empereur, aussi radin que peu commode, qui savoure bien plus l’idée de posséder un nouveau trésor que d’avoir entre les mains ledit trésor ?
Comme dans toutes les fables, il y a une morale, notamment sur le fait que croire posséder un objet est parfois aussi important que de réellement le posséder, et qu’il y a une certaine excitation à ne pas encore s’être approprié une chose qui nous est destinée. Mais pour ma part, j’aime à y voir d’autres messages forts et non dénués de pertinence. Les enfants apprennent ainsi que le vol n’apporte que des ennuis : si le capitaine de la garde ne s’était pas octroyé une chose qui ne lui appartenait pas, l’Empereur n’aurait pas eu à traverser toutes ces péripéties.
D’une certaine manière, on peut également considérer que cette fable met en garde contre l’amour excessif de l’or et l’envie maladive d’accumuler les richesses qui finissent par vous plonger dans des abîmes de solitude. Car, si le roi semble obsédé par cette idée d’ouvrir le coffre et d’en découvrir toutes les richesses, je ne peux m’empêcher d’y voir un moyen détourné de combler matériellement une vie vide de tout affect et de relations humaines enrichissantes.
Cette illustration avec l’Empereur tenant le coffre et le cajolant comme il le ferait avec un enfant me conforte dans cette impression. Il y a un tel décalage entre le visage serein, heureux et apaisé du personnage, et la réalité de la situation, que je n’ai pu m’empêcher de ressentir une certaine tristesse pour cet être pourtant méprisable…
J’ai, en outre, beaucoup apprécié l’intervention d’un animal qui illustre à merveille une expression. Il nous prouve également qu’il faut parfois faire montre de malice et d’une certaine intelligence des situations pour venir à bout des esprits les plus retors et se sortir de situations délicates. La force brute est rarement une solution… À cet égard, notre personnage m’a un peu fait penser au renard et à sa célèbre ruse.
Quant aux illustrations, elles possèdent incontestablement une identité propre qui donne corps et vie au récit. La manière dont l’illustrateur se joue des formes géométriques et de leur répétition dans les décors et les vêtements apporte un aspect très graphique à l’ensemble qui n’est pas sans rappeler le travail de Gustav Klimt.
En bref, voici une fable très graphique que je conseillerais aussi bien aux enfants qu’aux parents pour un moment de lecture coloré et non dénué d’intelligence.
La petite danseuse au visage figé, Marielle Piccolo
Hina, la petite danseuse de bois, est libérée de sa boite à musique par la souris du Lac. Liée à une malédiction, elle ne pourra pas rester dans un même lieu plus de trois jours. Accompagnée de ses deux ballerines transformées en chats, elle rencontrera un peintre qui voit tout en noir, une vendeuse de robes de poupées dévorée par l’avidité, et un toiletteur pour chats ayant peur des chats.
Auto-édition (4 août 2020) – 47 pages – 6,50€
Illustrations : Channy Da Pich
AVIS
Attirée par le résumé et la sublime couverture, je n’ai pas résisté bien longtemps au plaisir de me plonger dans ce conte enchanteur et plein de poésie que je prendrai plaisir à lire et relire.
L’autrice nous offre ici, en effet, une bien belle histoire, celle d’une danseuse de bois qui, enfermée dans sa boîte à musique, danse pour le plaisir de ceux qui en remontent la clé. Mais un jour, la gracieuse danseuse émet le souhait d’être libérée de sa cage dorée et d’avoir enfin la possibilité de jouir de sa liberté pour danser, non pas pour les autres, mais pour elle-même.
Comme par magie, n’oublions pas que nous sommes dans un conte, une bonne fée (ou plutôt une souris enchantée) lui apparaît et lui offre cette liberté tant désirée. Mais parce que la magie a toujours une contrepartie, Hina s’engage à ne jamais rester plus de trois jours au même endroit. Après tout, une danseuse ne se doit-elle pas de briller par ses mouvements ? Loin de s’offusquer de cette condition, Hina saute à pieds joints, et avec délice, dans cette nouvelle vie qui s’offre à elle.
Face à ce grand et inattendu bouleversement, elle pourra heureusement compter sur deux chats hauts en couleur, qui ne sont jamais d’accord entre eux, mais qui nous régalent de leur bonne humeur ! J’ai adoré l’idée de l’autrice de transformer les chaussures de l’héroïne en ces deux chats amusants, irrésistibles et attachants… Une idée délicieuse qu’elle saura parfaitement exploiter tout au long de cette aventure qui ne manque ni de charme ni d’émotion.
Page après page, Hina va rencontrer différents personnages, chacun d’entre eux lui permettant de découvrir une facette peu reluisante des humains : la noirceur et la mélancolie qui empêchent de voir la vie en couleurs, l’avidité qui rend la vie bien triste et morne, la peur qui enferme plus que n’importe quelle cage de fer… Et puis, bien plus positif, la danseuse découvre l’amour, noble sentiment qui fait battre le cœur, même des êtres de bois qui, en théorie, n’en ont pas.
Par ses talents de danseuse et sa vision pure du monde, dépourvue de peur et de préjugé, Hina aidera les personnes rencontrées à comprendre l’absurdité et/ou la vacuité de leurs comportements, à voir la beauté derrière les choses simples, à dépasser leurs pensées limitantes et à trouver en elles-mêmes la force d’être heureuses. Une aide précieuse et désintéressée qui poussera les nouveaux amis de la danseuse à lui proposer leur aide…
Mais de quoi peut bien avoir besoin une danseuse de bois, devenue vivante grâce à la magie d’une souris ? Laissons planer le mystère autour de cette question, mais si vous avez l’habitude des contes de fées, vous aurez probablement deviné. Pour ma part, j’ai adoré ce conte classique dans son déroulé, mais original par les thématiques abordées et les personnages secondaires qui ne manqueront pas de vous marquer. Suivre cette petite danseuse de bois qui, au gré des rencontres, évolue et découvre la vie hors de sa boîte à musique, a quelque chose de particulièrement émouvant et touchant.
En plus d’une écriture accessible, mais pleine de poésie, qui ravira les amateurs de plumes douces et imagées, l’ouvrage bénéficie de quelques illustrations, dont le charme réside dans leur simplicité et leur côté enfantin. Nul doute que les enfants apprécieront ces repères visuels pour se guider dans leur lecture qu’elle soit en parfaite autonomie ou non, le conte pouvant aussi bien se lire seul qu’en famille.
Parce qu’un conte sans morale n’en serait pas vraiment un, l’autrice nous offre, à travers son histoire pleine de poésie, de magie et de douceur, de jolis messages et une conclusion qui ravira autant les enfants que leurs parents. Après tout, n’avons-nous pas tous besoin de tendresse et de beaux sentiments ?
Je remercie l’autrice de m’avoir envoyé ce livre (disponible sur Amazon) en échange de mon avis.
Throwback Thursday Livresque #183 : sur les bancs de l’école
J’ai décidé de participer à un nouveau rendez-vous autour du livre : le Throwback Thursday Livresque. Imaginé par Bettie Rose Books, le principe est de partager chaque semaine sa lecture autour d’un thème mensuel qui sera décliné chaque semaine. Depuis peu, les liens de participation sont à déposer sur My-books.
Cette semaine, difficile de ne pas penser à un célèbre sorcier à lunettes, mais j’ai préféré opter pour un album jeunesse tout mignon qui m’a semblé parfait pour ce thème : 10 bonnes raisons d’aimer la maîtresse de Laurence Colin.
Dans cet album, les enfants, tous très adorables, inventent des excuses amusantes et parfois farfelues pour expliquer le comportement de leur maîtresse qu’ils semblent beaucoup aimer.
Pour en apprendre plus sur cet album, je vous invite à lire mon avis dont voici la conclusion :
10 raisons d’aimer la maîtresse est un mignon petit album plein de douceur, de tendresse et d’humour. Riche en dessins, cette lecture familiale devrait séduire petits et grands lecteurs.
Et vous, tentés par cet album ?
Quel titre auriez-vous choisi ?
Où est le dragon ?, Leo Timmers
Au beau milieu de la nuit, trois chevaliers prennent en chasse un dragon. Ils repèrent bien vite le dangereux monstre.
Mais dans le noir, il faut se méfier des apparences…Cambourakis (4 mars 2020) – 32 pages -14€ – À partir de 3 ans
Traduction :
AVIS
Où est le dragon ? This is the question ! Et une question de la plus haute importance, voyez-vous, parce que si on ne retrouve pas le dragon aperçu par le roi, ce dernier n’osera pas aller au lit ! Mais pas de panique, un dragon, ça doit bien se voir même dans le noir, non ?
C’est, du moins, ce qu’espéraient les trois chevaliers lancés à sa poursuite avant de finir par déchanter. Malgré tout ce qu’ils connaissent des caractéristiques physiques d’un dragon, à chaque fois qu’ils pensent l’avoir identifié, ils se retrouvent nez à nez avec tout, sauf un dragon ! Saperlipopette, c’est que la chasse au dragon, ça n’est pas facile et pas très rigolo !
Enfin si, c’est amusant à rire à pleines dents pour les enfants qui devraient être séduits par les (més)aventures de trois chevaliers qui font faire une importante découverte : les apparences sont bien souvent trompeuses. Mais après une telle leçon de vie, ne serait-il pas enfin temps d’aller au lit ?
On saluera le piquant avec lequel l’auteur casse les codes des histoires de chevalerie. Il se moque ainsi gentiment de ces trois chevaliers, peut-être preux, mais pas très dégourdis, et pousse les enfants à ressentir une certaine empathie pour un dragon qui, ma foi, n’a pas l’air bien méchant. Après tout, quel est son crime à part d’avoir été aperçu par le roi ?
En plus d’une histoire amusante non dénuée de mystère, j’ai apprécié les rimes simples, mais efficaces, qui apportent une dose supplémentaire de charme à l’album. La forme ne manque pas non plus d’atouts : un format agréable à prendre en main, de jolies illustrations, des traits ronds et simples très expressifs…
Mais ce que j’ai probablement préféré, c’est la manière dont sont alternativement plongés les chevaliers dans l’ombre et la lumière avec, comme fil conducteur, une bougie qui éclaire et qui fait toute la lumière sur la vérité. Une vérité bien souvent éloignée de celle imaginée par les enfants dont l’imagination est ici stimulée avec originalité et mordant.
Plein d’humour et de charme, cet album jeunesse est une merveille de poésie et de beauté que je conseillerais à tous les petits et grands enfants. Pour ma part, nul doute que je le relirai avec grand plaisir.
Abracadabri, abracalphabet ! Laura Joansen
Alex est curieux et pose plein de questions, sur tout, tout le temps. Papa, lui, est bavard. Il aime titiller cette curiosité et cet empressement d’apprendre propres à l’enfance. Dans cette première aventure, Alex a besoin d’en savoir plus sur les signes qu’il voit sur les pages des livres. Alors, après avoir prononcé une formule magique, ils découvrent ensemble une fête qui bat son plein : des arlequins, des acrobates, des funambules pirouettent sous une pluie de confettis. C’est dans ce décor imaginaire que Papa initie Alex aux lettres et mots et éveille sa conscience phonologique.
Books on Demand – (26 septembre 2019) – 28 pages – 7,5€ – 4 ans et +
AVIS
Cet album fait partie de la collection d’albums illustrés les Aventuriers des mots qui propose une initiation ludique à la grammaire française, une initiative que je trouve très intéressante et que j’aurais probablement adorée quand j’étais enfant.
J’ai donc accepté avec plaisir de découvrir cet album ayant une nièce de quatre ans avec laquelle je compte bien le lire avant de le donner à mon frère qui s’occupe, en général, de la traditionnelle lecture du soir. J’étais également curieuse de découvrir comment l’autrice allait arriver à rendre la grammaire ludique. Parce que je ne sais pas pour vous, mais ludique, ce n’est pas le premier mot auquel j’associerais cette discipline dont je ne garde pas particulièrement un bon souvenir…
Et je dois dire qu’il m’a suffi de lire la première page pour être sous le charme de cet album jeunesse qui est un très bel outil permettant aux enfants de faire une jolie incursion dans le monde des lettres, des mots, des sons et de l’alphabet. Pour ce faire, l’autrice a eu la très bonne idée de mettre en scène un papa et son enfant, un duo attendrissant que l’on suit avec grand plaisir et une certaine tendresse.
Alex est un enfant curieux qui se pose des questions sur la manière dont s’y prend son papa pour faire parler les lettres. Il n’en fallait pas plus à ce dernier pour l’entraîner dans une jolie aventure dans laquelle le père et le fils croiseront des danseuses, chacune représentant, grâce à ses élégants mouvements, une lettre.
J’ai adoré cette idée de personnifier différentes lettres de cette manière ne doutant pas que l’impact soit très fort dans l’imaginaire des jeunes lecteurs et que le travail de mémorisation en soit grandement facilité ! Les jeux sur les sons et leurs répétitions se révèlent également intéressants et ludiques.
L’album est joliment illustré avec des dessins d’une grande douceur et des couleurs chaleureuses qui incitent à l’évasion et à une douce rêverie. Il faut dire que le voyage sur le chemin des mots et de la lecture est un long processus qui mérite qu’on y mette les formes pour le rendre agréable.
À cet égard, si je n’ai pas d’enfant et aucune connaissance en matière de pédagogie, j’ai trouvé qu’il se dégageait beaucoup de bienveillance et de partage à travers les pages. Le papa d’Alex se révèle doux et plein d’imagination, ce qui me semble deux caractéristiques favorables pour inciter les échanges et encourager un enfant à s’approprier les connaissances qu’on met à sa portée. Loin d’être passif, le jeune lecteur devient alors acteur à part entière du récit et s’identifie donc aisément à Alex avant de partager sa grande soif d’apprendre et sa volonté de partir à la conquête de ce vaste monde qui s’offre à lui.
L’album est accessible aux enfants à partir de 4 ans, mais l’autrice ne se limite pas à un vocabulaire basique qui en aurait quelque peu limité la portée. Elle s’amuse avec les mots et n’hésite pas à en faire découvrir de nouveaux aux jeunes lecteurs tout en veillant à mettre leur définition en notes de bas de page. Une attention que les adultes lisant le texte devraient apprécier puisqu’il s’avère parfois difficile d’expliquer simplement des mots que l’on connaît pourtant. La richesse du vocabulaire permet, en outre, de proposer la lecture de cet album à des enfants de différents âges.
En conclusion, empli de douceur et de bienveillance, cet album est un très bon moyen pour encourager les enfants à se lancer dans la plus belle aventure qui puisse exister, celle des mots, des sons et de la lecture. Beau et intelligent, voici un ouvrage à lire, à relire et à partager pour que le monde infini des mots s’ouvre à chaque enfant.
Je remercie Laura Joansen de m’avoir envoyé ce livre en échange de mon avis.
Comment Akouba inventa l’écriture, Jean-Philippe Arrou-Vignod et Tali Ebrard
Il était une fois un pays lointain où les enfants oubliaient la nuit tout ce qu’ils apprenaient le jour à l’école. Comment faire pour se souvenir des leçons du maître? Akouba le malin trouvera-t-il une solution ?
Gallimard Jeunesse (23 mai 2019) – 36 pages – 13,50€ – 4 ans et +
AVIS
Drôle de malédiction dans ce village reculé : chaque nuit, les élèves oublient ce qu’ils ont appris durant le jour ! Impossible dans ces conditions de progresser, voire, par exemple, d’apprendre une simple addition.
Une source d’inquiétude pour le maître vieillissant qui aimerait, avant de s’éteindre, transmettre tout ce savoir que son père lui a transmis. Une transmission orale ancestrale qui a son charme, mais qui risque à terme de menacer la culture et toutes les connaissances du village.
Heureusement, un enfant, Akouba, se démarque de ses camarades par son intelligence et sa volonté de grandir et d’apprendre. Avec pugnacité et débrouillardise, il tentera alors par tous les moyens de remédier à la situation sans jamais baisser les bras devant les échecs dont il saura d’ailleurs tirer parti.
Plein d’intelligence et de bienveillance, ce conte sur la force de la volonté et la transmission du savoir nous plonge avec délice dans un village où la connaissance trouvera un moyen d’être enfin mis à la portée de tous… Une jolie manière de montrer l’importance de l’écriture et de la lecture, mais aussi celle de se donner les moyens de faire de ses rêves une réalité. Car sans la détermination d’Akouba, qui ne peut que susciter l’admiration des lecteurs et de ses petits camarades, rien n’aurait pu arriver.
Cette jolie histoire, qui joue sur les mots et les répétitions créant humour et immersion, est mise en valeur par de grandes illustrations aussi belles que lumineuses.
En bref, voici une très jolie histoire sur l’importance de l’écriture qui devrait plaire aux petits et aux grands lecteurs en quête d’un ouvrage richement illustré et non dénué d’une certaine sagesse et beauté.
Feuilletez le livre sur le site des éditions Gallimard.
Peindre la pluie en couleurs, Aurélie Tramier
Morgane est directrice de crèche. Solitaire, fermée, elle ne supporte plus les enfants et rêve d’acheter une pension pour chiens. Tout vole en éclats lorsque sa sœur meurt dans un accident de voiture, lui laissant deux enfants en héritage. Eliott et Léa vont bousculer le quotidien de leur tante et faire ressurgir chez elle de douloureuses blessures profondément enfouie.
Marabout (27 mai 2020) – 336 pages – Broché (19,90€) – Ebook (9,99€)
AVIS
Quant j’ai reçu la proposition de Babelio pour recevoir ce roman, je n’ai pas hésité très longtemps aimant beaucoup la ligne éditoriale de la collection La Belle Étoile qui m’avait déjà régalée avec Un métro pour Samarra et Je refuse d’y penser. Et je peux vous dire que mon empressement initial a été récompensé au-delà de toutes mes attentes, Peindre la pluie en couleurs ayant été un coup de cœur.
Une voiture, un arbre, des sirènes d’ambulance, il n’en faut pas plus pour faire voler en éclats le bonheur de toute une famille et priver deux enfants de leurs parents. Orphelins à l’âge de 10 et 6 ans, Eliott et sa petite sœur, Léa, seront donc recueillis par Morgane, cette tante un peu froide qui ne semble apprécier que son chien. Les débuts de cette cohabitation forcée sont maladroits et parfois tendus… Être une directrice de crèche consciencieuse et efficace ne fait pas de Morgane la parfaite maman à l’instinct inné pour répondre aux besoins des enfants ni même la personne le plus chaleureuse au monde. Il lui faudra donc apprendre à s’occuper de ces deux enfants, elle qui n’en voulait pas, tout en affrontant une mère bien décidée à récupérer ses petits-enfants quoi qu’il lui en coûte.
Malgré ce sujet du deuil en toile de fond, le roman n’est pas triste et pour moi qui suis très sensible au sujet de la mort que j’ai tendance à éviter, cela fait toute la différence. J’ai adoré la manière dont l’intrigue se focalise autour du travail de reconstruction sans pour autant occulter les moments de doute et le poids de l’absence. Derrière la perte, la vie n’est jamais loin, un joli message porté avec subtilité par ce roman, et de manière bien plus brute de décoffrage par un personnage secondaire que j’ai tout simplement adoré : un croque-mort qui croque la vie à pleines dents !
En dépit de son exubérance avec sa tendance à faire des entrées remarquées à base de chansons de Dalida lancées à tue-tête de son corbillard, cet homme n’est pas dénué d’une certaine sagesse, de celle que l’on apprend à l’école de la vie et qui enseigne l’humilité. Respirant la bonté et la bienveillance, il aidera, souvent sans le vouloir, Morgane à voir la vie sous un autre jour. Quant à Viviane, un membre du personnel de la crèche, elle se révélera un atout précieux pour Morgane qu’elle soutiendra et conseillera sans jamais la juger. Douce, gentille et avec un cœur d’ange, cette femme m’a beaucoup touchée d’autant qu’elle doit elle-même porter son propre fardeau…
Ces aides spontanées et désintéressées contrebalanceront la méchanceté de la mère de Morgane qui s’immisce dès qu’elle le peut dans l’éducation que son aînée donne à ses petits-enfants. Si j’ai détesté ce personnage que j’ai trouvé révoltant, il n’en demeure pas moins intéressant de par son évolution et dans la mesure où il permet de mettre en avant le poids des secrets, des incompréhensions et de ces injustices qui minent des familles.
Petit à petit, on lève donc le voile sur l’histoire familiale compliquée de Morgane marquée par les tensions entre elle et sa mère qui lui a toujours préféré sa sœur, Émilie. L’amour inconditionnel pour Émilie est d’ailleurs le seul point commun qu’elles partagent puisque Morgane a toujours adoré sa petite sœur et veillé farouchement à la défendre quitte à se sacrifier… Car si Morgane semble avoir le cœur desséché, c’est qu’elle porte un lourd secret et une croix dont elle a bien du mal à se départir. Dès le début de l’histoire, l’autrice évoque à demi-mot ce qu’a vécu par Morgane avant de nous dévoiler la vérité… Je vous laisserai le soin de découvrir le secret qui la ronge, mais je peux néanmoins vous dire que j’ai apprécié la manière dont Morgane réalise progressivement que là où elle ressent de la honte, il n’y a pas à en avoir, du moins pas de son côté, et que derrière son acte, se cache bien plus d’amour qu’elle ne pourrait l’imaginer…
D’ailleurs de l’amour et de beaux moments, il n’en manque pas dans ce roman dans lequel nos personnages apprennent à se connaître et à s’apprivoiser mutuellement. Il ne s’agit pas ici de remplacer des parents ou de venir combler un vide mais bien de développer une relation particulière empreinte d’amour, de confiance et de bienveillance. Une chose que Morgane, Eliott et Léa apprennent à faire main dans la main, à leur propre rythme. Tout ne sera pas facile, la perte de leurs parents affectant évidemment Eliott et Léa, mais les deux enfants trouveront leur place aux côtés d’une tante qui n’est finalement peut-être pas aussi froide qu’il n’y paraît. Quant à Morgane, solitaire depuis si longtemps, c’est un peu comme si elle avait tout à (ré)apprendre : à s’ouvrir, à sourire, à rire, à danser, à lâcher prise, mais surtout à se pardonner afin d’apprendre à aimer, la condition sine qua non pour offrir ce foyer chaleureux dont ont tellement besoin son neveu et sa nièce.
L’autrice a opté pour une narration alternée entre Morgane et Eliott. Le procédé, en plus de rendre la lecture dynamique et quelque peu addictive, nous permet de nous sentir au plus proche de l’histoire et des personnages qui se sont révélés, pour la plupart, particulièrement attachants. Bien que ma vie soit différente de la sienne, je me suis parfois reconnue en Morgane avec sa maladresse dans les interactions avec autrui, sa difficulté à exprimer ses émotions, son amour inconditionnel pour son chien et son rêve d’ouvrir une pension pour chiens… Elle m’a donc beaucoup touchée comme l’adorable Léa qui est un petit rayon de soleil capable de chasser en un sourire tous les nuages. Léa possède une intelligence du cœur qui offre une belle bouffée d’oxygène à sa tante et à son frère, mais elle n’en demeure pas moins une petite fille qui a besoin d’être consolée la nuit, seul moment où elle semble laisser s’exprimer son propre chagrin.
Quant à Eliott, il se montre très mature pour son âge bien que la mort de ses parents le pousse à commettre des actes qui ne lui ressemblent pas et qui nécessiteront l’intervention bienveillante d’une professionnelle. Je l’ai trouvé adorable dans son envie de protéger sa sœur et de faire de son mieux pour la rendre heureuse. Cela offre d’ailleurs de très jolis moments de complicité entre les deux enfants. Entrant parfois en conflit avec Morgane et profitant des largesses de sa grand-mère même quand il comprend que ce n’est pas une bonne idée, Eliott n’en demeure pas moins un gentil garçon qui fait de son mieux pour affronter une situation difficile qui a chamboulé toute sa vie et fait voler en éclats ses repères. Il lui faudra donc un peu de temps pour s’ouvrir à sa tante et lui laisser une place dans son cœur…
À l’aide d’une plume simple et d’une grande fluidité, l’autrice sait toucher les lecteurs, énonçant avec une certaine délicatesse des vérités parfois difficiles tout en s’efforçant d’instiller beaucoup de lumière et de chaleur dans les cœurs. Il en résulte une belle lecture pleine d’émotion avec des phrases qui frappent, interpellent et sur lesquelles on prend le temps de réfléchir…
Difficile de résumer en quelques mots ce roman qui a tellement résonné en moi. Est-ce parce que j’ai retrouvé quelques similitudes entre Morgane et moi, que j’ai terminé ce livre pile la veille de mes 35 ans, son âge, ou que l’autrice a su se frayer une place jusque dans mon cœur ? Peu importe finalement puisque le résultat est là, un roman coup de cœur qui m’a fait pleurer, sourire et qui m’a insufflé un élan d’optimisme fou, moi à la pessimiste de nature. Un livre qui évoque la perte, la mort, la résilience, le pardon, la rédemption, la notion de famille, mais surtout la vie et la possibilité pour chacun de renaître de ses cendres. Touchant et émouvant, Peindre la pluie en couleurs est de ces romans que l’on n’oublie pas et que l’on porte haut dans son cœur.
Je remercie Babelio et la collection La Belle Étoile pour m’avoir permis de découvrir Peindre la pluie en couleurs d’Aurélie Tramier en échange de mon avis.