George Sand mène l’enquête, Delphine Bilien

Couverture George Sand mène l’enquête

Je remercie Steven pour la lecture commune de George Sand mène l’enquête de Delphine Bilien, un roman qui a peiné à nous convaincre malgré un résumé des plus prometteurs !

1868. Aurore Dupin, alias George Sand, se retrouve au cœur d’un scandale. La mort de l’éditeur d’Antoine Dumesnil, un nouvel auteur va remettre en cause la récompense qu’il doit recevoir.
George Sand rend visite à l’une de ses amies en Anjou. L’occasion pour elle d’assister à la remise du prix littéraire à venir dont le favori est un certain Antoine Dumesnil, étoile montante de l’écriture. Or, la mort suspecte de son éditeur, Roger Balanquin, pourrait remettre en question cette récompense. L’auteur est en effet le dernier à avoir vu la victime vivante. Jeanne Tusseau, une jeune domestique, sollicite l’aide d’Aurore Dupin et finit par la convaincre que de terribles secrets lient la victime à Antoine Dumesnil et son épouse. Diffamation ou intuition ? La réalité pourrait bien dépasser les romans et plonger la célèbre écrivaine dans une histoire digne de ses intrigues…

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AVIS

Je connais peu l’œuvre de George Sand mais appréciant l’idée de voir cette grande autrice mise en scène dans une enquête, je me suis lancée avec plaisir dans ce cosy mystery qui ne m’a néanmoins pas complètement convaincue. Je n’ai aucun gros reproche à lui faire mais une petite succession de petites choses qui ont rendu la lecture bien moins captivante que je l’aurais souhaité.

J’aime quand les auteurs nous plongent au coeur de l’intrigue sans passer par mille détours, mais il y a quand même une différence entre rapidité et précipitation. Là, tout est posé trop rapidement au point qu’il m’a fallu un petit moment avant d’arriver à situer les personnages. Fort heureusement, au fil des pages, on réalise que chaque personnage possède une personnalité assez marquée pour le rendre facilement identifiable, mais pas forcément passionnant. Le roman souffre, en effet, de sa relative brièveté, ne permettant pas à l’autrice de développer la personnalité de chacun en profondeur, ce qui m’a donné le sentiment de survoler les choses. Sentiment confirmé par un contexte historique et socio-culturel à peine effleuré quand il aurait été intéressant de l’approfondir. Je pense plus particulièrement à la question des différences de classe, qui aura son importance pour saisir tous les tenants et aboutissants de l’histoire…

Malgré cette impression de trop peu et de confusion, l’autrice m’ayant parfois semée avant de me récupérer au détour d’informations me permettant de faire le lien entre présent et passé, j’ai apprécié de suivre nos trois alliés de circonstance dans leur ou plutôt leurs enquêtes. Si le titre se révèle trompeur, George Sand étant loin d’être l’élément moteur de l’intrigue, j’ai aimé découvrir Aurore Dupin, la femme derrière l’autrice. Une femme bienveillante, chaleureuse et observatrice qui va s’appuyer sur son travail d’écrivaine pour formuler des hypothèses et tirer des conclusions pertinentes. Bien que j’aurais aimé que son rôle soit plus flamboyant, j’ai apprécié que Delphine Bilien joue la carte du réalisme en ne la transformant pas d’un coup de baguette magique en enquêtrice surpuissante.

À ses côtés, nous suivons Benjamin, avocat et fils d’une amie de George Sand, et Jeanne, une domestique qui n’est  pas vraiment ce qu’elle prétend être. L’autrice fait planer un certain mystère autour de cette femme, me poussant à m’interroger sur ce secret qu’elle semble cacher et sa volonté que sa véritable identité ne soit pas dévoilée. Néanmoins, j’ai été assez déçue de la révélation la concernant, que j’ai trouvée un tantinet mélodramatique, avec en prime la sensation d’un problème de temporalité entre sa situation actuelle et les événements qui l’ont conduite à changer de vie. On a l’impression qu’il s’est passé beaucoup de temps alors que ce n’est pas le cas…

Le personnage n’en demeure pas moins intéressant par sa complexité, Jeanne semblant à bien des égards fragile tout en nous prouvant lors de moments importants, qu’elle est bien plus forte, courageuse et déterminée qu’on ne pourrait le penser. Dommage que ses secrets et mensonges ne compliquent singulièrement la tâche de ses alliés… Quant à Benjamin, c’est peut-être le personnage que j’ai préféré, appréciant sa loyauté, son esprit d’analyse et son humanité. L’une de ses décisions m’a paru éthiquement contestable, mais finalement assez fidèle à sa volonté que justice soit faite. Ce trio d’enquêteurs improvisés pourrait sembler mal assorti, mais il fonctionne très bien, une fois les fils de leur coopération dénoués et que chacun trouve sa place. À cet égard, j’ai aimé la relation qui se noue entre les trois personnages, George Sand jouant un peu le rôle de coordinatrice bienveillante et très lucide notamment sur l’émergence de certains sentiments.

Quant à l’enquête sur la mort de l’éditeur d’un auteur à succès, en lice pour un prix littéraire, elle ne présente d’intérêt que parce qu’elle permet de faire ressusciter, à défaut des morts, les ombres du passé. Un passé avec lequel Jeanne aurait aimé prendre des distances, mais qui va inexorablement la rattraper… pour le pire, mais pas que. De fil en aiguille, des liens se forment entre présent et passé sans que cela ne m’ait jamais véritablement passionnée. Je ne dirai pas qu’il n’y a pas de suspense, mais il est trop tenu pour me tenir en haleine, d’autant qu’il y a une révélation tellement évidente que ça a fini par m’exaspérer qu’elle ne soit pas vite découverte par nos apprentis enquêteurs. Je pense sincèrement qu’avec un roman plus étoffé et des effets de manche moins appuyés, mon ressenti aurait été plus positif.

Je reconnais cependant que le roman se lit vite, l’autrice s’appuyant sur une plume tout en légèreté qui rend la lecture agréable, d’autant que certaines scènes m’ont semblé assez théâtrales dans leur déroulé, leur rythme et leur musicalité. Il s’établit une sorte de proximité avec les décors et les personnages qui fait que même si on ne trépigne pas d’impatience à l’idée de tourner les pages, on le fait naturellement comme on retrouverait le chemin de la maison. À cet égard, le côté cosy est parfaitement retranscrit malgré de vilains secrets, des sentiments bien laids, une symbolique forte autour des serpents et la mort qui frappe par deux fois, à des années d’intervalle.

En conclusion, George Sand mène l’enquête de Delphine Bilien ne m’a pas convaincue autant que je l’aurais souhaité, la faute à une mise en place trop rapide rendant certaines choses confuses et à la psychologie des personnages que j’ai trouvée trop survolée. Ce cosy mystery devrait néanmoins plaire aux amateurs du genre notamment pour son ambiance au charme particulier, et ses personnages pour lesquels on développe un certain attachement. Et puis, bien qu’elle ne porte pas l’enquête sur ses seules épaules, il est agréable de voir un monument de la littérature telle que George Sand troquer sa casquette d’écrivaine pour celle d’enquêtrice. Entre secrets, mensonges et bassesse humaine, une enquête dans l’antre d’une sordide histoire qui réveillera les ombres du passé !

Découvrez l’avis de Steven

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50 réflexions sur “George Sand mène l’enquête, Delphine Bilien

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  2. Bien que nos avis se rejoignent fortement, tu sembles bien plus convaincue que je ne l’ai été ou tout du moins sévère que moi.
    Il faut dire que l’auteure démontre de louables intentions gâchées par une précipitation et un scénario bien vite expédié ! Je regrette tellement cette grossièreté car j’ai apprécié l’aperçu de cette enquête même si je regrette le rôle de faire-valoir octroyer à George Sand.

    Aimé par 2 personnes

    • C’est vrai que c’est dommage cette précipitation qui nuit à la qualité et la profondeur du scénario ! Quant au rôle de George Sand, il aurait mérité d’être bien plus développé ou le titre d’être changé… C’est peut-être d’ailleurs ce que je reprocherai le plus au roman, son titre trompeur qui promet tant.

      Aimé par 1 personne

  3. Dommage…
    Je dois dire qu’après avoir mené l’enquête avec Voltaire, Oscar Wilde et Jane Austen, sans parler des artistes du Club de la Rue de Rome, je n’ai pas très envie de réitérer l’expérience avec d’autres auteurs… Ton avis sur ce livre me conforte dans mon idée de ne plus me diriger vers ce genre de romans.

    Aimé par 1 personne

      • Dans ces livres ce sont réellement les auteur-ice-s qui mènent l’enquête, mais aucun ne m’a réellement convaincue. A la limite, Jane Austen était la plus sympa à suivre, mais ça passait parce que c’est de la littérature jeunesse.
        Je pense que c’est juste le côté « personne réelle utilisée comme personnage de fiction » qui ne fonctionne pas avec moi, du moins pas dans ce genre de contexte. J’avais eu aussi des déceptions avec d’autres romans du genre impliquant d’autres célébrités. J’ai du mal avec ces livres parce que j’ai du mal à croire aux personnages, peut-être à cause du côté un peu fanfiction du genre?

        Aimé par 1 personne

      • Je vois ce que tu veux dire pour le côté fanfiction d’autant qu’il peut parfois flirter avec celui d’opportunisme. Mais au moins, je suis rassurée sur le fait que dans tes lectures, les personnalités mises en scène mènent vraiment l’enquête 🙂

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  5. Je ne pense pas que je me tournerais vers cette série cosy. Même si c’est un genre que j’apprécie beaucoup, surtout entre deux lectures plus sombres, je deviens de plus en plus exigeante quant à mes attentes. Alors je vais plutôt continuer toutes celles que j’ai commencées, dont « Les thés meurtriers d’Oxford » (j’ai beaucoup aimé le tome 1) ou encore « Les dames de Marlow ». J’ai d’ailleurs laissé de côté, pour quelques temps, la série « Hannah Swensen », car j’ai l’impression de relire la même chose à chaque tome.

    Aimé par 1 personne

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