La fille d’avant, JP Delaney

Couverture La fille d'avant JP Delaney

Après un drame éprouvant, Jane cherche à tourner la page. Lorsqu’elle découvre le One Folgate Street, elle est conquise par cette maison ultra moderne, chef d’oeuvre de l’architecture minimaliste, parfaite. Mais pour y vivre, il faut se plier aux règles draconiennes imposées par son architecte, Edward Monkford, aussi mystérieux que séduisant. Parmi celles-ci : répondre régulièrement à des questionnaires déconcertants et intrusifs. Peu à peu, Jane acquiert une inquiétante certitude : la maison est pensée pour transformer celui qui y vit. Or elle apprend bientôt qu’Emma, la locataire qui l’a précédée et qui lui ressemble étrangement, y a trouvé une fin tragique.
Alors qu’elle tente de démêler le vrai du faux, Jane s’engage sur la même pente, fait les mêmes choix, croise les mêmes personnes… et vit dans la même terreur que la fille d’avant.

AVIS

Je remercie Bianca du blog Des livres, des livres ! pour cette lecture particulièrement addictive que nous avons toutes les deux beaucoup aimée et sur laquelle nous avons pris plaisir à échanger.

Ainsi, si vous en quête d’un page-turner, La fille d’avant est fait pour vous puisqu’une fois commencé, il devient bien difficile de s’arrêter. Dès le début, on se prend au jeu de l’alternance entre la fille d’avant, Emma, et celle de maintenant, Jane. Deux femmes qui ont cédé, à des périodes différentes, à l’appel d’une maison très particulière…

La maison imaginée par l’énigmatique architecte Edward Monkford est un concentré de technologie qui n’est pas destinée à tout le monde, que ce soit en raison de son architecture minimaliste et épurée, ou de ses conditions de location plutôt déroutantes. En effet, pour avoir la chance d’y habiter, il faut se soumettre à un questionnaire étrange et tordu que l’on découvre en partie au fil des pages, être retenu par Monkford lui-même, et accepter de se plier à plus de 200 règles, toutes très particulières. Des règles qui vous privent de votre libre arbitre quant à la manière de vivre chez vous et d’en occuper l’espace : oubliez vos piles de livres en équilibre, vos souvenirs de famille, vos bibelots, les vêtements laissés en vrac sur une chaise, et même votre chat… Et si cela n’était pas suffisant, il faut accepter de répondre régulièrement à des questionnaires plutôt intrusifs !

Des conditions qui n’ont pourtant pas rebuté Emma ou Jane. L’une le paiera de sa vie, l’autre va y connaître le bonheur avant d’y découvrir l’angoisse et les doutes… Car cette maison censée être un sanctuaire ordonné devient, petit à petit, une sorte de prison inquiétante où les règles de Monkford conditionnent votre vie, la technologie devient votre gardien et des yeux invisibles semblent vous observer. J’ai adoré l’ambiance délicieusement angoissante instaurée par l’auteur, d’autant qu’elle va crescendo, vous donnant le sentiment d’être tombé dans un piège mortel dont les dangers sont faciles et difficiles à identifier en même temps. Et ce n’est pas Jane qui vous dira le contraire, cette dernière se posant de plus en plus de questions malgré ses sentiments pour un homme dont le charisme l’hypnotise…

Que penser du tragique événement qui a frappé le One Folgate Street avant son arrivée ? Suicide, triste accident, meurtre ou vengeance d’une maison qui n’a pas apprécié qu’on n’en respecte pas les règles ? Si la dernière hypothèse semble loufoque, l’auteur sème tellement le doute qu’elle finit par devenir plausible. Mais une autre piste se dessine, celle d’un homme dont le désir de tout contrôler nous enserre comme un étau et nous donne le sentiment d’étouffer. Comment les personnes ayant occupé sa maison ont-elles pu accepter de respecter autant de règles et de se laisser déposséder d’elles-mêmes sur l’autel d’un étrange et inaccessible idéal de perfection ?

Une question qui m’a hantée et m’a fait suivre Emma et Jane avec fascination, d’autant que JP Delaney nous propose de découvrir leur histoire grâce à une alternance de points de vue et de temporalité parfaitement orchestrée. Les deux femmes se révéleront très différentes l’une de l’autre, du moins psychologiquement. Mais leur destin nous apparaît bien plus lié qu’on pourrait le penser, ce qui n’est d’ailleurs pas fait pour nous rassurer vu la fin prématurée de l’une d’entre elles. De fil en aiguille, la vérité se rapproche nous offrant un dénouement auquel j’avais pensé, mais que j’avais finalement trop tôt écarté. J’ai donc apprécié la fin même si le dernier chapitre m’a semblé de trop, parce que certains schémas mis bout à bout ont tendance à renforcer des stéréotypes que je ne supporte plus…

À travers ce thriller, l’auteur évoque tout un panel de thématiques parfois difficiles comme le deuil périnatal, la tendance des êtres humains à s’enfermer dans des schémas de vie répétitifs et délétères, le piège des apparences, mais il nous raconte surtout une histoire d’obsession ou plutôt des histoires obsessionnelles… Et je dois dire qu’il le fait bien, voire très bien puisqu’on sent de l’intérieur le côté malsain d’un amour transformé en désir de possession, et la force d’une pression exercée par un esprit qui a fait du contrôle de sa vie et de celle des autres un objectif. Un esprit qui devrait néanmoins finir par réaliser que l’humain est bien plus complexe et compliqué qu’un résultat de QCM.

En conclusion, La fille d’avant est un thriller psychologique et machiavélique qui tisse sa toile autour des lecteurs, avant de les plonger dans une ambiance angoissante et étouffante à mesure que les obsessions des uns et des autres se dévoilent et se renforcent. Parfois tordu par les comportements malsains qu’il décrit avec force et réalisme, ce roman se démarque également par l’emprise qu’il finit par exercer sur les lecteurs devenus les spectateurs d’un drame passé qui menace dangereusement de se répéter. Intense, addictif et pénétrant, un thriller à lire d’une traite pour mettre le point final à un cercle vicieux dans lequel chacun joue sa propre partition !

Découvrez l’avis de Bianca

39 réflexions sur “La fille d’avant, JP Delaney

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